Bandeau
Fragments d’Histoire de la gauche radicale
Slogan du site
Descriptif du site
Six années d’émigration (écrit en 1943)
RKD-Bulletin n° 1 - 5ème Année - Nouvelle série - Septembre 1945
Article mis en ligne le 17 mai 2016
dernière modification le 11 février 2018

par ArchivesAutonomies

L’article suivant a paru le 15 juillet 1943 dans le RKD-Bulletin n° 16.

Sommaire :

1ère période (Automne 36 - Avril 38) : La réaction s’accentue. Jusqu’à l’occupation de l’Autriche. Bruno. – A la remorque du trotskisme.

2ème période (Avril 38 - Août 38) : De l’occupation de l’Autriche jusqu’à l’occupation des Sudètes. - Trotski devant la commission Dies. - Commencement de la lutte organisée contre l’évolution croissante vers la droite et contre le social-patriotisme. - La résolution de juillet 1938.

3ème période (Août 1938 - Septembre 39) : Derniers préparatifs de guerre. – De Munich à l’éclatement de la guerre. – Fin de la guerre d’Espagne ; - Social-patriotisme croissant. – "Proclamation" de la "4ème". – Lutte internationale contre le social-patriotisme et le centrisme ; exclusion de H.G, Juniusbriefe, "Bulletin Oppositionnel", prise de contact avec la RWL et sa commission internationale. – Comité responsable : D, B (?), E. – Fusion de notre organisation à l’intérieur du pays avec l’opposition du Kampfbund (KBO).

4ème période (Septembre 1939 - Mai 1940) : Jusqu’à la bataille de France en 1940. – "Der Marxist". – Le travail à Anvers.

5ème période (Mai 40 - Novembre 40) : La bataille de France et l’écroulement de l’impérialisme français. – L’internement de la plupart des camarades, évasions et reprise des liaisons interrompues.

6ème période (Novembre 40 - Décembre 41) : La conférence de novembre. – L’entre en guerre de la Russie, du Japon et des Etats-Unis, terreur impérialiste croissante dans le monde entier, dissolution politique et organisationnelle de tous les groupements centristes. – Mort du camarade B. – Divergences politiques et politiques-organisationnelles avec les camarades E. et F. – Activité concentrée pour la formation d’un cadre conscient, qualifié et prêt à l’action, pour la formation d’une organisation communiste-révolutionnaire plus large : RKD-Bulletin, cercles d’études, base programmatique, statuts pour l’organisation plus large, décision au sujet de la peine de mort, création du fonds technique, etc. – Comité responsable : A ;, M., J, G. – La discussion sur la question russe. – Pas de résultat de notre activité parmi les camarades français.

7ème période (1er janvier 1942 - Décembre 1942) : Augmentation de la terreur impérialiste et des tensions sociales dans le monde entier. – Eclatement des luttes aux Indes. – Consolidation des bases politiques et politiques-organisationnelles de l’organisation : adoption du défaitisme révolutionnaire pour la Russie, par l’organisation entière ; passage de la seule propagande à la propagande et à l’agitation ; extension générale et consolidation de nos liaisons. – Terreur impérialiste aggravée contre nos rangs : perte d’une série de camarades et de sympathisants par des arrestations et des déportations. – Actions de sauvetage et de solidarité. – Solution de la question financière par des expropriations.

8ème période (Janvier 1943 jusqu’à l’éclatement des premières révolutions en Europe) : Continuation et accentuation de la terreur impérialiste, dernière phase de la deuxième guerre impérialiste mondiale, dernière phase de notre émigration, phase décisive de notre lutte pour le nouveau parti révolutionnaire en Allemagne et dans toute l’Europe, pour la 4ème Internationale communiste. – Accentuation des mesures politiques-organisationnelles pour la protection et la sécurité de notre travail international communiste-révolutionnaire. – Reprise de liaisons avec l’organisation restée dans le pays, délégation de camarades envoyée au pays par l’organisation d’émigration. – Lutte active idéologique contre le trotskisme et tout autre opportunisme, formation d’un secrétariat européen (international) communiste-révolutionnaire, édition d’un bulletin communiste-révolutionnaire et d’un journal en langue française.

NOTRE ÉMIGRATION

Janvier 1943.

Notre émigration touche à sa fin. La dixième année de la dictature hitlérienne s’achève. La dictature hitlérienne et la guerre impérialiste mondiale touchent à leur fin et par là aussi l’actuelle émigration allemande. D’autre part, l’émigration allemande communiste oppositionnelle s’est liquidée en tant qu’organisme politique par la trahison à la cause du prolétariat allemand (voir notre article "Traîtres"). Dans ce pays – qui après 1933 était le centre de l’émigration allemande – il n’y a que notre organisation qui est restée sur place et qui non seulement est restée fidèle à la cause de la Révolution prolétarienne mais encore qui tâche, en engageant toutes ses forces, de réparer les effets des capitulations et trahisons des autres groupes d’émigration.
Les traîtres ont liquidé depuis 1933 l’émigration communiste pour mettre à sa place une émigration bourgeoise ; à nous de liquider l’émigration communiste pour la remplacer par le nouveau parti communiste en Allemagne et en Europe.
L’émigration politique et une forme déterminée de la lutte politique, nécessitée par des périodes particulières de terreur dans le pays originaire de l’émigration. En même temps, la lutte politique continue dans le pays même. Notre émigration s’est considérée dès le début comme partie du mouvement communiste-révolutionnaire tout entier de l’Allemagne et du monde entier. Son but a toujours été : continuer l’activité communiste révolutionnaire sous une forme différente qui nous a été imposée ; se liquider ultérieurement en fusionnant à nouveau organisationnellement avec le groupe resté à l’intérieur du pays.
Le contenu et l’essence de notre émigration ont été jusqu’à maintenant en premier lieu : créer, éduquer e consolider un cadre communiste-révolutionnaire qui pourra donner, dans la lutte commune, un appui décisif aux camarades restés au pays et qui militent dans des conditions beaucoup plus difficiles. En plus, nous avons influencé une série d’émigrés apolitiques ou proches de nous. Nous avions espéré, depuis l’armistice de 1940 (depuis la concentration de masses d’émigrés dans des camps de travail), de former une organisation communiste révolutionnaire plus large. Finalement, nous avons influencé les organisations centristes (trotskistes) en Belgique, en France et en Suisse et nous avons formé et renforcé des oppositions de gauche dans leurs rangs.
Où en sommes-nous ? 1°) Notre cadre a été décimé. Des camarades se sont détachés, d’autres ont été arrêtés, d’autres ont été nouvellement gagnés. Le niveau politique et l’expérience pratique de tous les camarades ont assez augmenté. Malgré tout, nous sommes aujourd’hui plus forts que nous ne l’étions au début de notre organisation. 2°) Notre intention de créer une organisation d’émigration CR plus large était au point de se réaliser quand la terreur impérialiste (les déportations massives et les fuites massives qui en résultaient) a réduit nos efforts à néant. Jusqu’à nouvel ordre, il n’y a pas de travail à faire de côté-là. 3°) Notre activité parmi les camarades trotskistes français n’a pas été couronnée de succès marquants. Cela provient surtout de ce que nous n’avions pas encore perdu toutes nos illusions concernant ces groupes et que nous nous trouvions par conséquent encore à la remorque du trotskisme. Malgré la liquidation des groupes trotskistes en zone "libre", l’explication idéologique avec le trotskisme est de la plus grande importance internationale, par conséquent aussi pour la future révolution allemande.
Les deux tâches suivantes + création d’une organisation communiste révolutionnaire de cadres en Allemagne et en France ainsi que la formation d’un secrétariat CR européen (international) en tant que point d’attraction de la nouvelle (4ème) Internationale ouvrière, - ne forment en réalité qu’une seule tâche. Toute notre activité tend vers sa réalisation. Cette activité rentre maintenant dans une phase décisive. Il s’agit de concentrer toutes nos forces pour cette phase décisive. Avant de parler de la nouvelle phase qui commence pour nous avec l’année 1943, passons en revue le travail accompli pendant ces dernières six années.

1ERE PERIODE (AUTOMNE 36 - AVRIL 38) : LA REACTION S’ACCENTUE. JUSQU’A L’OCCUPATION DE L’AUTRICHE. BRUNO. – A LA REMORQUE DU TROTSKISME.

Au cours des années 1935 et 36 nous avions décidé d’organiser consciemment une émigration, pour réaliser nos tâches politiques et organisationnelles. Au printemps 1937 un délégué permanent devait être envoyé en Europe occidentale. La police nous a obligés de réaliser ce plan sous une forme différentes et avant la date prévue. L’automne 1936 à avril 1938 le camarade Bruno a été le représentant de notre organisation à l’étranger.
Cette période est caractérisée par les préparatifs intenses pour la guerre impérialiste mondiale. En Espagne, le prolétariat venait de livrer sa dernière bataille avant cette guerre mondiale. Notre organisation se trouve encore en collaboration étroite avec les trotskistes ("Mouvement pour la 4ème Internationale") et est reconnu comme section officielle par le SI. (Littérature : les trois numéros de la revue "Der einzige Weg" éditée en Suisse par les trotskistes suisses, sudètes et autrichiens, autour de cette revue une querelle plutôt bureaucratique que politique a eu lieu entre les représentants de l’IKD et la rédaction de la revue).

2EME PERIODE (AVRIL 38 - AOUT 38) : DE L’OCCUPATION DE L’AUTRICHE JUSQU’A L’OCCUPATION DES SUDETES. - TROTSKI DEVANT LA COMMISSION DIES. - COMMENCEMENT DE LA LUTTE ORGANISEE CONTRE L’EVOLUTION CROISSANTE VERS LA DROITE ET CONTRE LE SOCIAL-PATRIOTISME. - LA RESOLUTION DE JUILLET 1938.

En mars 1938, le deuxième partage impérialiste de l’Europe commence par l’occupation de l’Autriche par l’impérialisme allemand. En Espagne, le prolétariat avait été refoulé définitivement de toutes les positions qu’il avait conquises auparavant ; en France, il reculait partout devant la pression bourgeoise. Les préparatifs de guerre et la campagne chauvine poussent rapidement vers la nouvelle guerre mondiale.
C’est dans cette période que Trotski fait sa déclaration célèbre devant la commission Dies où il précise qu’en cas de guerre, il faudrait exercer l’opposition politique envers l’impérialisme français et le sabotage militaire envers l’impérialisme allemand. Cette déclaration nous a fait le même effet que la déclaration de Staline à Laval, faites quelques années auparavant et approuvant le réarmement français. Dans l’un comme dans l’autre cas, nous nous sommes d’abord refusés de croire à la véracité de ces déclarations avant de les voir confirmées sans équivoque. Mais alors, notre décision était prise : lutte non pas pour un redressement sans issue pour sauver les éléments internationaliste et pour créer une nouvelle organisation ouvrière, libre de tout opportunisme. Par là, notre groupe se trouvait devant des tâches internationales.
La déclaration de Trotski mentionnée ci-dessus a mis en lumière la position trotskiste depuis 1914, les "Thèses de guerre" de 1934 et toute une série de déclarations et d’articles trotskistes de 1933 à 1939. Le social-patriotisme grandissant de l’avant-guerre se poursuit comme un fil de trame jusqu’au triomphe complet dans le massacre actuel.
A cette époque notre représentation à l’étranger se transforme en organisation. Plusieurs camarades émigrent en France et en Belgique. Le camarade B. se rend chez le camarade Bruno. Le résultat de la discussion prolongée entre les deux camarades est l’accord complet dans la question de la guerre et sur la nécessité d’une offensive pour le défaitisme révolutionnaire. Cette nécessité est exprimée dans la résolution de juillet 1938 ou en même temps sont énumérées les divergences d’opinion sur une série de questions stratégiques. La discussion de ces questions a seulement été abordée.
Le cde Bruno, d’après ce que nous savons, était en désaccord avec la théorie de la Révolution permanente déjà depuis 1936. Ce désaccord s’et exprimé dans des discussions orales sur la question espagnole et les perspectives de la révolution allemande. Notre perspective et notre mot d’ordre "Jamais plus de république démocratique" n’a pas trouvé son approbation complète. En 1938, il a attaqué violemment la théorie de la révolution permanente, sans la discuter systématiquement. Il a identifié l’opportunisme trotskiste avec les réalisations marxistes et révolutionnaires de Trotski et s’est rapproché en même temps des idéologies et des représentants du Bureau de Londres et des groupements qui formaient le pont entre les trotskistes et le Bureau de Londres. Au lieu d’évoluer vers la gauche et de rompre avec les deux courants centristes parents entre eux, il a évolué vers la droite.
Pourtant, la déclaration de juillet 1938 qui a enregistré aussi les divergences mentionnées ci-dessus est à la fois la conclusion d’une période et le début d’une nouvelle. C’est le premier document politique de notre organisation à l’étranger, qui elle-même prend naissance en 1938. Ce n’est qu’en automne 1938 que les différents camarades dispersés se réunissent en France pour un travail politique et organisationnel conséquent.

3EME PERIODE (AOUT 1938 - SEPTEMBRE 39) : DERNIERS PREPARATIFS DE GUERRE. – DE MUNICH A L’ECLATEMENT DE LA GUERRE. – FIN DE LA GUERRE D’ESPAGNE ; - SOCIALI-PATRIOTISME CROISSANT. – "PROCLAMATION" DE LA "4EME". – LUTTE INTERNATIONALE CONTRE LE SOCIAL-PATRIOTISME ET LE CENTRISME ; EXCLUSION DE H.G, JUNIUSBRIEFE, "BULLETIN OPPOSITIONNEL", PRISE DE CONTACT AVEC LA RWL ET SA COMMISSION INTERNATIONALE. – COMITE RESPONSABLE : D, B (?), E. – FUSION DE NOTRE ORGANISATION A L’INTERIEUR DU PAYS AVEC L’OPPOSITION DU KAMPFBUND (KBO).

C’est une période mouvementée et fructueuse qui commence. C’est sur la base de la déclaration de juillet qu’en Europe occidentale un comité responsable est formé, composé de quatre camarades (B, E, H, G). Le camarade Bruno est considéré comme membre de ce comité, mais ne peut participer aux travaux qu’indirectement à cause de son séjour dans un pays éloigné. Les Juniusbriefe ont été éditées par ce comité et ont défendu nos principes internationalistes et défaitistes révolutionnaires à la lumière des événements impérialistes de l’époque et en commençant ouvertement leur lutte contre l’opportunisme trotskiste. Ces écrits contiennent surtout des articles des camarades Bruno et B.
En septembre 1938 la "Conférence Internationale", prévue depuis longtemps et ajournée souvent est subitement convoquée et doit "proclamer" par un coup de théâtre bureaucratique la 4ème Internationale non existence. La bureaucratie opportuniste a voulu s’assurer la seule présence du cde. Haller comme représentant de notre organisation, mais notre organisation lui a retiré la confiance et a délégué les cdes B. et E. Haller défendait déjà à cette époque l’opportunisme trotskiste.
C’est dans cette période que les événements se précipitèrent. Les tensions impérialistes augmentèrent à grands bonds. Nos deux délégués exigèrent une prise de position internationaliste sans équivoque en face de la catastrophe impérialiste qui approchait. Mais c’est à une résistance froidement décidée de bureaucrates sans cerveau et sans conscience qu’ils se heurtèrent. Toute décision dépendait du Chef (Trotski). Nos deux délégués durent se contenter de faire l’obstruction pure et simple et de lire une série de résolutions et de rapports attaquant énergiquement la position officielle. Les Juniusbriefe ont été diffusées parmi tous les délégués. Après cette conférence, il était clair pour nous tous que notre présence dans l’organisation trotskiste n’était plus qu’une question tactique. Comme nous ne voyions pas encore une meilleure organisation internationale, nous restions pour des raisons tactiques pour provoquer aussitôt que possible une scission dans les meilleures conditions et pour sauver ainsi la cause de l’Internationalisme prolétarien.
C’est dans ce but que nous avons édité au printemps 1939 un "Bulletin Oppositionnel" de cinquante pages environ, en langues allemande et française auquel ont contribué des camarades belges, suisses et français. L’ancien comité responsable s’est dissout peu à peu ; les camarades Haller et Gerber n’étaient pas disposés de s’engager avec nous sur le chemin qui devait aboutir à la rupture avec l’organisation trotskiste. Au contraire, ils se sont alliés avec les représentants du SI et l’IKD contre nous.
Ce SI trotskiste (Oscar Fischer, Johre) était fermement décidé d’en finir avec nous, une fois la proclamation bureaucratique réalisée. A cette occasion il a employé des méthodes typiquement staliniennes. D’abord, notre organisation a été "exclue" sans que les causes et les circonstances de cette exclusion nous aient été communiquées. Ensuite, on a déclaré que nous n’avions "jamais" été des membres du mouvement pour la 4ème. Les faits d’avoirs été invités comme représentants officiels de notre section à la "Conférence Internationale", d’avoir élu un de nos camarades dans le "Bureau International des Jeunes" (trotskistes), etc. n’étaient donc apparemment que des malentendus. Finalement les cdes Haller et Gerber, en accord avec Johre, Oscar Fischer et Cie. ont détourné en janvier 1939 nos archives, notre bibliothèque et autres propriétés de l’organisation. Sur cela, ils furent exclus d’abord provisoirement et ensuite, après s’être déclarés fiers de cette attitude, définitivement.
Johre et O. F. ont applaudi à cette action et le dernier a évité toute discussion politique et toute entrevue avec nous. Le SI tout entier a refusé toute réponse à notre critique politique qui allait en s’approfondissant et en s’élargissant. La propriété organisationnelle détournée a failli tomber entre les mains de la police ce qui aurait provoqué une catastrophe dont on ne pouvait pas mesurer l’étendue ; nous étions dans la période où l’on croyait voir des parachutistes et des espions de la cinquième colonne à chaque coin de rue. Le matériel a pu être sauvé par un hasard.
En décembre 1938, l’organisation de l’intérieur a délégué le cde Dieter. Le nouveau comité responsable était formé par les cdes D, B, E. En même temps une série d’autres camarades, anciens membres de l’organisation de l’intérieur sont revenus à l’organisation dans l’émigration.
Le cde Dieter portait la discussion sur la "question du parti" dans l’émigration. En mai 1939 le comité responsable a adopté officiellement la critique léniniste des entrées liquidatrices et de toute la politique organisationnelle du trotskisme. Malheureusement, la rupture avec les cdes H. G. a rendu impossible la discussion avec eux, qui avait à peine commencé. En février 1939, la cde B a été délégué en France pour y prendre une série de liaisons et pour consolider la nouvelle opposition de gauche. Le résultat de cette activité était le "Bulletin oppositionnel". Le comité responsable, après avoir pris la liaison avec l’organisation trotskiste de gauche américaine (RWL), a signé les "14 points" d’Oehler, qui ont été modifiés partiellement mais insuffisamment, sur proposition du camarade B. En même temps le camarade Dieter a déployé une activité de noyautage et de propagande dans le RS à Anvers. L’adhésion du cde Dieter au RS s’est faite à l’insu du comité responsable et a été désapprouvé par nous.
Les événements se précipitaient à nouveau. En mai 1939 l’impérialisme allemand occupa ce qui restait encore de l’ancienne Tchécoslovaquie. La course aux armements prenait des formes de plus en pus accentuées.
La guerre d’Espagne est terminée. En France, le mouvement ouvrier recule de plus en plus, surtout depuis la défaite de la grève générale de novembre 1938, défaite consciemment provoquées par les chefs. Les masses ouvrières désertent les syndicats et les grands partis de gauche (SFIO, PC, etc.) les organisations trotskistes de l’Europe se trouvent déjà en pleine décomposition politique et organisationnelle. Cette évolution atteint son point culminant dans l’éclatement de la guerre en septembre 1939. Une nouvelle période commence, pour la classe ouvrière internationale et donc aussi pour nous.
Toute une série de documents de notre organisation témoignent de cette dernière période d’avant-guerre et de notre activité dans cette période et de notre activité dans cette période. Nous rappelons surtout les articles "le deuxième partage impérialiste a commencé" et "Johre et les Etats modernes". Dans le 1er article, nous détruisons la légende du "pacte à quatre" contre la Russie ; nous démontrons que la Russie ne représente plus de danger pour les puissances capitalistes de l’occident et que le nouvel impérialisme allemand est devenu le danger principal pour l’Occident impérialiste. Nous démontrons l’inéluctabilité de la guerre entre le bloc USA-Angleterre-France-Russie et le bloc tripartite". Nous expliquons que les Etats-Unis et l’Allemagne sont les adversaires impérialistes principaux et les chefs de file des deux blocs et que toutes les autres contradictions impérialistes sont subordonnées à cette contradiction impérialiste principale. Nous prouvons enfin que l’occupation de l’Autriche et des Sudètes ne sont pas des épisodes isolés mais le début d’un nouveau partage impérialiste et inévitablement ces événements doivent aboutir non seulement à une nouvelle guerre européenne mais à la deuxième guerre impérialiste mondiale.
Dans le deuxième article nous dénonçons le social-patriotisme de Johre et Cie.
Le cde Bruno est, dans cette période, de plus en plus séparé des travaux du comité responsable. Les événements le jettent dans un pays où, séparé de l’organisation, il tombe de plus en plus sous une influence opportuniste. Lors de la discussion de la question nationale dont la solution n’est possible qu’à travers la révolution permanente, et le défaitisme révolutionnaire, il adopte une position national-communiste (pour la "libération" de la Tchécoslovaquie) et nie ainsi non seulement l’idée marxiste de la révolution permanente mais aussi les principes défaitistes révolutionnaires de la résolution de juillet 1938.
Vu l’écroulement opportuniste de l’IKD, notre organisation rejette toute unification avec cette organisation et adopte officiellement le nom de RKD.
La vague opportuniste qui déferle sur le monde et qui est à la fois la cause et la conséquence de la réaction impérialiste qui avance, ne s’arrête pas devant notre organisation à l’intérieur. Cette organisation, contre la volonté de l’organisation de l’émigration, fusionne avec l’opposition du KB ; au lieu de détacher cette opposition du KB social-patriote, elle renforce les illusions de redressement et prépare la reconstitution du KB centriste et opportuniste.

4EME PERIODE (SEPTEMBRE 1939 - MAI 1940) : JUSQU’A LA BATAILLE DE FRANCE EN 1940. – "DER MARXIST". – LE TRAVAIL A ANVERS.

Les rapports internationaux se relâchent. Notre activité continue quand même. Un nouveau comité responsable est constitué, composé par les cdes Dieter et E, dans un pays neutre, la Belgique. Ce comité édite trois numéros de la revue "Der Marxist" parallèlement à l’organe théorique œhlérien "The Marxist". Les liaisons politiques et organisationnelles avec la commission internationale de contact sont consolidées à Anvers, nous avons groupé des sympathisants dans des cercles d’études politiques mais il n’y a qu’un seul qui est gagné pour le travail actif. En même temps, le cde F. est gagné pour l’organisation. La correspondance internationale est continuée autant que possible. Un camarade maintient la liaison par courrier avec sept pays différents. Les rapports entre Anvers et le cde Bruno sont rompus sur l’initiative du cde E. qui lui, prend aussi l’initiative d’exclure le cde Bruno pour des divergences politiques non discutées. Un autre camarade est délégué par l’organisation de l’intérieur ; ainsi la guerre nous apporte non seulement des affaiblissements mais aussi des renforcements.

5EME PERIODE (MAI 40 - NOVEMBRE 40) : LA BATAILLE DE FRANCE ET L’ECROULEMENT DE L’IMPERIALISME FRANÇAIS. – L’INTERNEMENT DE LA PLUPART DES CAMARADES, EVASIONS ET REPRISE DES LIAISONS INTERROMPUES.

Mai 1940 apporta du changement en Europe. Les armées impérialistes qui jusqu’ici, tout en étant officiellement en état de guerre, s’étaient guettées réciproquement, rentrent en action. Les armées de l’impérialisme allemand inondent la Hollande, la Belgique et la France. Le comité responsable à Anvers et le cde G. en France sont obligés de cesser leur activité. Les cdes Dieter et E sont mis dans des camps de concentration. Finalement tous les camarades réussissent à s’évader de différents camps de concentration. En octobre et en novembre 1940, la période de désorganisation commencée en mai 1940 est terminée et nous nous réunissons pour notre première conférence depuis la guerre.

6EME PERIODE (NOVEMBRE 40-DECEMBRE 41) : LA CONFERENCE DE NOVEMBRE. – L’ENTRE EN GUERRE DE LA RUSSIE, DU JAPON ET DES ETATS-UNIS, TERREUR IMPERIALISTE CROISSANTE DANS LE MONDE ENTIER, DISSOLUTION POLITIQUE ET ORGANISATIONNELLE DE TOUS LES GROUPEMENTS CENTRISTES. – MORT DU CAMARADE B. – DIVERGENCES POLITIQUES ET POLITIQUES-ORGANISATIONNELLES AVEC LES CAMARADES E. ET F. – ACTIVITE CONCENTREE POUR LA FORMATION D’UN CADRE CONSCIENT, QUALIFIE ET PRET A L’ACTION, POUR LA FORMATION D’UNE ORGANISATION COMMUNISTE-REVOLUTIONNAIRE PLUS LARGE : RKD-BULLETIN, CERCLES D’ETUDES, BASE PROGRAMMATIQUE, STATUTS POUR L’ORGANISATION PLUS LARGE, DECISION AU SUJET DE LA PEINE DE MORT, CREATION DU FONDS TECHNIQUE, ETC. – COMITE RESPONSABLE : A ;, M., J, G. – LA DISCUSSION SUR LA QUESTION RUSSE. – PAS DE RESULTAT DE NOTRE ACTIVITE PARMI LES CAMARADES FRANÇAIS.

La période qui s’ouvre embrasse plus d’une année. C’est au cours de cette année que la guerre impérialiste atteint son extension géographique la plus grande ; la Russie, l’Amérique et le Japon rentrent dans la guerre mondiale. C’est aussi dans cette année que notre organisation arrive à la conclusion que l’opportunisme trotskiste ne se rapporte pas seulement aux questions du parti et de la guerre, mais surtout à la question de la Russie. Cette évolution se heurte à nouveau à des obstacles dans nos propres rangs (E. F.). Et c’est ainsi que l’année 1941 est caractérisée non seulement par une propagande extérieure qui va en s’accroissant, mais aussi par des discussions intérieures.
La conférence de novembre 1940 apporte la rupture formelle avec le trotskisme dans toutes les questions, sauf dans la question russe. Des thèses sur le développement de la situation internationale jusqu’en novembre 1940, sur l’écroulement du mouvement ouvrier international, sur la question nationale e sur les principes stratégiques de la lutte pour le pouvoir prolétarien. La même conférence a adopté des statuts organisationnels.
La majorité des cdes présents a adopté une résolution dans laquelle elle se prononce nettement pour le marxisme et le bolchevisme de Lénine. Ce sont les côtés positifs de la conférence de novembre. Cependant la conférence n’abandonnait pas encore la conception trotskiste concernant la Russie et se bornait à discuter des questions secondaires (nécessité d’une bureaucratie, défense conditionnelle ou inconditionnelle).
Encore avant la conférence, la liaison a été reprise avec des camarades français trotskistes de gauche. De cette liaison résultait une certaine activité dans le POI dans le midi. En février 1941 la mort d’un de nos meilleurs camarades, du cde Dieter nous frappe durement.
Au sein de l’émigration allemande, nous avons animé des cercles d’études auxquels nous participons activement pour en détacher les éléments sains. Nous réussissons à gagner quelques camarades pour notre cause, d’influencer fortement plusieurs autres. Dans ce but, nous avons édité les écrits suivants : "A la veille de la révolution prolétarienne en Europe", "Hitler et Napoléon". "La fuite du remplaçant du Fuehrer", "Notre but et notre chemin", etc.

En mai 1941, un nouveau comité responsable est formé, composé des camarades A, M, J et G. A partir de juin 1941, un bulletin de discussion et d’information, surnommé "RKD-Bulletin, 4ème Internationale ! " paraît régulièrement. Encore avant l’édition de ce bulletin, nous avons adopté en commun avec des camarades communistes de gauche isolés, une résolution qui se prononce pour le défaitisme révolutionnaire dans tous les pays, la Russie y comprise.
Au cours de ’l’année 1941, la discussion intérieure portait surtout sur deux questions : LA QUESTION RUSSE ET LA QUESTION DE LA DISCIPLINE ORGANISATIONNELLE. Deux fractions s’opposent, l’une, majoritaire abordait avec décision l’examen de la conception trotskiste-œhleriste et insistait sur le maintien et la consolidation du principe organisationnel de Lénine. L’autre fraction, composé par les cdes F et E défendait et approfondissait même les illusions trotskistes concernant la Russie et niaient en paroles et en actes les principes organisationnels de Lénine.
Le cde A avait commencé à douter, déjà dès avant la guerre, de la conception trotskiste concernant la Russie et par conséquent il s’était abstenu lors de notre réunion préparative à la conférence internationale de septembre 38, quand la question russe était à l’ordre du jour. Aussi il avait – vainement – cherché la liaison avec des groupements communistes de gauche. Cela avait provoqué une certaine méfiance de la part des autres membres du comité responsable d’avant-guerre. En 1941, nous avions enfin des contacts avec des camarades allemands influencés par les idées de Maslow et de Ciliga.
Il s’agissait là d’anciens militants du groupe Maslow, d’un ancien membre de l’opposition de gauche du PCA et plus tard de la gauche du SAP, et d’un ancien militant du PCA. Ce sont ces camarades et un ancien militant de l’IKD qui ont signé en commun avec nous la résolution défaitiste-révolutionnaire, publiée dans le RKD-Bulletin n° 1.
Dans le RKD-Bulletin n° 3 (septembre), la discussion sur la question russe est développée largement. En août 1941 la déclaration programmatique, reproduite dans l’introduction "Notre Victoire", est adoptée avec quelques réserves. A cette époque commence l’opposition ouverte du cde J à l’IKD et il réussit de créer parmi les cdes de l’IKD restés sur place, une atmosphère oppositionnelle qui est caractérisée en même temps par des sympathies croissante pour notre groupe.
En octobre 1941 la majorité adopte, dans une résolution, le travail "La Dictature du Prolétariat" ("Le pouvoir"). Ces analyses et contributions de principe aboutissent ensuite inévitablement à la conclusion révolutionnaire défaitiste. En même temps une série de mesures organisationnelles s’imposent : décision concernant la peine de mort (accepté également par la minorité), création d’un fonds technique, exclusion du cde E du Cadre restreint, pour des fautes graves concernant la conspiration, élaboration des statuts pour l’organisation plus large. Voici le bilan de notre activité en 1941 qui peut être complété par les rapports organisationnels des deux groupes locaux.
L’année 1942 marque un tournant dans notre activité politique et organisationnelle, où le facteur temps devient un facteur décisif.