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Fragments d’Histoire de la gauche radicale
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Petrini
{Bilan} n°27 - Janvier-Février 1936
Article mis en ligne le 24 février 2017
dernière modification le 16 février 2017

par ArchivesAutonomies

Nous avons déjà parlé du geste des autorités soviétiques remettant entre les mains de Mussolini l’anarchiste italien Petrini. Ce dernier est passé en jugement à Aquilla et momentanément il ne nous est pas encore possible d’informer nos lecteurs sur les suites de ce procès. Le petit barbier Germanetto a envoyé de Moscou une lettre aux socialistes où ce méprisable parasite accuse Petrini d’être un provocateur, un agent du fascisme. Les social-patriotes, par la plume d’un nommé Alfa, lui ont répondu vertueusement que ces procédés d’extradition effectués par la Russie étaient un peu forts. Ils auraient préféré qu’une commission d’enquête socialo-centriste puisse d’abord établir - ce qui est facile pour ces professionnels de la crapulerie - que Petrini est un mouchard. Dernièrement, ils écrivirent qu’il fallait attendre la conclusion du procès d’Aquilla : selon que Petrini sera ou non frappé, l’on pourra établir une accusation contre lui ; enterrons donc cette histoire et vive l’unité d’action !
Cependant, nous répétons à nouveau ce que nous écrivions ici même : si Petrini était un provocateur, pourquoi l’avoir renvoyé en Italie au lieu de le démasquer en Russie ? La Guépéou travaillerait-elle en liaison avec l’Ocra de Mussolini ? Tout cela est évidemment absurde et ne sert qu’à justifier la liaison entre la répression soviétique et fasciste contre les ouvriers révolutionnaires.
Mais supposons que Petrini succombe et passe au fascisme, après une vie consacrée à la lutte prolétarienne. Le geste ignoble de la Russie, la campagne des hyènes centristes seraient-ils excusés ? Certainement pas, car ils seraient la cause de la chute d’un militant dont l’organisme aurait ébranlé par les persécutions du « pays du socialisme » et par celles du fascisme.
Germanetto a pourtant mis en évidence le caractère réel de cette affaire en écrivant aux socialistes : "tous nous devons rendre difficile à Petrini son travail". Pour lui, il s’agissait d’un travail de provocation. Mais les ouvriers auront compris que centristes et socialistes veulent s’entendre pour étrangler tout geste de classe des ouvriers, aujourd’hui que l’on acclame sa propre bourgeoisie, que l’on glorifie l’exploitation stakhanoviste des ouvriers russes. Front unique, dit Germanetto et l’écho socialiste lui riposte : Oui ! Front unique. Ces messieurs sont les Noske-Scheidemann de demain. Actuellement, ils ne peuvent assassiner physiquement et moralement des ouvriers que sur une échelle encore restreinte.
Mais la signification politique du cas Petrini est aussi celle-ci : un État prolétarien qui ne peut s’assimiler un ouvrier anarchiste s’avère profondément infecté. Quant à la question personnelle de Petrini, l’avenir prouvera s’il s’est montré indigne de son passé.