par ArchivesAutonomies
L’État - tous les États - se préparent à la guerre civile contre la révolution communiste. En France, l’armée a été ré-organisée dans ce but. En cas d’insurrection, la force territoriale encadrera la population, les appelés faisant fonctionner certains secteurs clés. La force de manoeuvre, composée surtout d’engagés, constituée de corps spécialisés, affrontera militairement les insurrections. La force de dissuasion ne servira qu’en dernier recours à anéantir les zones incontrôlables à l’aide d’armes nucléaires tactiques ; en attendant, elle sera utilisée comme moyen de pression. Il s’agît d’abord pour le Capital et l’État de ne pas perdre le contrôle de la population.
Tous les députés, sauf celui du PSU, ont voté ces mesures. Tous les partis sont contre une guerre civile révolutionnaire. Pour le pouvoir, la "D.O.T., défense opérationnelle du territoire, est aujourd’hui organisée pour éviter tout retour aux événements qui ébranlèrent la France en Mai 68." (Fanton, 19-1-70) La gauche revendique une place dans le contrôle et la quadrillage de la population. PC et PS sont depuis longtemps nationalistes et militaristes. Leur programme commun ne demande qu"’un contrôle "démocratique" de l’armée, c’est à dire leur propre participation aux décisions concernant l’armée. L’humanité souhaite une "défense nationale fondée sur la responsabilité de chaque français, et par conséquent sur la conscription, sur l’union intime de l’armée et de la nation." (23-3-73) Le Manifeste du PSU espère une défense nationale populaire grâce à un service national populaire chargée, de la coopération internationale (défense de rire), de certaines taches de police (!) "Toute la gauche veut que chacun se sente "responsable" et se mobilise au service de la "nation" (= la société existante).
La reforme du sursis a un but autant idéologique que pratique : envoyer tout le monde a l’armée à 18 ans, c’est réaliser ce brassage et cette unification nationale dont rêve la Capital.. Cette mesure lèse les lycéens, puisqu’elle supprime le passage automatique dans le supérieur. Elle leur enlève ainsi un droit qui n’était reconnu qu’à eus seuls, -et non aux fils d’ouvriers et de paysans. Qu’est-ce qu’un droit réservé seulement à une catégorie particulière, sinon un privilège ?
Si l’on accepte de se situer à l’intérieur du système social actuel, si l’on admet l’existence du service militaire, la loi Debré n’est pas plus "anti-démocratique" que l’ancienne formule. Du point de vue du service militaire, la réforme actuelle est même plus cohérente. On ne peut l’attaquer qu’en sortant de cette logique, et non en proposant une autre solution au même problème, fût-ce en voulant mobiliser les masses.
La revendication du droit au départ entre 18 et 25 ans, au "choix", semble défendre tous les jeunes. Or on voit mal l’intérêt qu’aurait la majorité des jeunes, ceux qui ne font pas d’études, à retarder leur départ au service. Cela ne les aidera pas à faire des études, que de toute façon les handicaps socio-culturels interdisent à la plupart. Ce droit "universel" est illusoire parce que utilisable seulement par une minorité (comme le droit aux études). Cette revendication revendique donc un privilège.
La revendication d’une formation militaire effectuée, non dans le cadre habituel, mais dans son propre "milieu social", est absurde. Ce n’est ni la séparation de lieu (caserne), ni le personnel d’encadrement (militaires de carrière) qui crée l’embrigadement. L’embrigadement résulte de la collectivité et de l’institution qui forment les soldats. D’ailleurs le milieu social est tout aussi contre-révolutionnaire que l’armée. L’école et les syndicats sont-ils moins nationalistes que la caserne ? Ou alors on suppose que quartiers, entreprises, etc., soient dès maintenant contrôlables par le "peuple" ou les "travailleurs". Après le service à la carte, le self-service militaire ! Une proposition aussi délirante ferait le jeu du militarisme dès qu’on commencerait à l’appliquer. Les institutions scolaires municipales, syndicales, les entreprises, qui sont les rouages du Capital, intégreraient encore plus subtilement les jeunes (et toute la population) à la machine militaire. On ne peut pas plus améliorer le service militaire, qu’on ne peut démocratiser l’armée. Ce mot d’ordre utopique sème la confusion car il correspond à la tentative de l’État, et de tous les partis, d’enraciner l’armée dans la vie sociale. Il sera repris demain par la contre-révolution.
Tout montre que les lycéens et les élèves du technique refusent en réalité la société actuelle et l’embrigadement en général, à l’école, à l’armée, à l’usine. Ils acceptent superficiellement les mots d’ordre des organisations qui vivent en organisant - plus ou moins - les luttes des autres. C’est un moyen pour eux, comme les incendies récents, de crier leur dégoût de ce monde, et de l’ennui qu’il engendre Les groupes gauchistes ne sont que les portes-paroles officiels d’un mouvement qui les dépasse et leur échappe.
Les élèves des lycées et des CET n’ont pas envi de travailler et de s’abrutir : ce seul fait est bien plus subversif que tous les slogans qu’ils crient, faute de mieux. Ce qu’ils veulent : tout. Ce qu’ils espèrent : le communisme. Ils feront la révolution, y compris contre tous les groupes politiques.
Quelle que soit l’issue immédiate du conflit, il ne trouvera sa vraie solution que dans la révolution. Armée de métier ou de conscription, "fasciste" ou " démocratique", ne sont qu’oppositions dans le même camp : celui du Capital.
Dès maintenant des milliers de jeunes, et d’autres, savent ce qu’est la violence contre-révolutionnaire et la violence révolutionnaire. La violence n’est pas un "instrument", elle surgit des rapports sociaux contraignants. Le Capital a toujours produit la violence.
Il ne suffit plus de dire : A bas l’armée ! L’anti-militarisme de façade se démasque parce qu’il veut une armée "démocratique", "nationale", "populaire", "des travailleurs", ... , donc plus efficace. Affirmons : Vive la guerre révolutionnaire communiste ! Comme le Capital, et contre lui :
PRÉPARONS DÈS AUJOURD’HUI LA GUERRE CIVILE DE DEMAIN !
"AVANT DE RÉALISER UN CHANGEMENT SOCIALISTE, IL FAUT UNE DICTATURE DU PROLÉTARIAT, DONC UNE CONDITION PREMIÈRE EST L’ARMÉE PROLÉTARIENNE. LES CLASSES OUVRIÈRES DEVRONT CONQUÉRIR SUR LE CHAMP DE BATAILLE LE DROIT A LEUR PROPRE ÉMANCIPATION. "
K. Marx
Aujourd’hui où le milieu social est toujours celui du Capital, que peut signifier "la préparation de la guerre civile", sinon l’apprentissage militaire effectué dans ce milieu social que dénonce le tract par ailleurs ?
Ce souci de trouver des mots d’ordre d’action révolutionnaire l’absence évidente de mouvement révolutionnaire positif lui fait découvrir une masse déjà subversive, et peut-être même déjà consciente des objectifs révolutionnaires : les lycéens "qui veulent tout et espèrent le communisme". Triomphalisme gratuit. Comme si c’était ce qu’ils espèrent et veulent aujourd’hui qui rendra les lycéens révolutionnaires demain ! C’est au contraire malgré ce qu’ils veulent et espèrent encore aujourd’hui qu’ils pourront le devenir demain. Est-ce simplement une mauvaise formulation qui fait naître une ambiguïté de fond ? En tout cas, ce langage "idéaliste" (vouloir, espérer) est significatif d’un mode d’appréhension qu’on retrouve dans la phrase de Marx qui conclut le tract.
Cette phrase de Marx est complètement caduque et puisée en particulier dans le schéma des révolutions bourgeoises du 19° siècle (lesquelles ne l’oublions pas n’étaient pas toutes effectuées alors, et que Marx et Engels appuyaient en préconisant l’appui à ces révolutions de leurs prolétariats nationaux qui, contrairement à la révolution française du 18° siècle constituaient une force importante. C.f. "Écrits militaires" de Marx et d’Engels aux éditions de l’Herne, et le texte annoncé et à venir sur cette question). Le vocabulaire même de Marx en est imprégné ("conquérir le droit (!) à l’émancipation"), même si ce n’est que symptomatique d’une inversion fondamentale : pour Marx, il semble que la lutte armée déterminerait le contenu de la révolution prolétarienne (conquise sur le champ de bataille !). Cela s’explique en concevant le prolétariat comme force militaire d’appui pour la bourgeoisie. On voit ce qu’aujourd’hui cette conception a de totalement contre-révolutionnaire.
Au contraire, dans la révolution communiste la lutte armée pour la destruction de l’État capitaliste est entièrement déterminée par le contenu spécifique de cette révolution, par l’activité sociale communiste ; et l’activité militaire contre-révolutionnaire est elle même déterminée par l’activité communiste. Voir la contre-révolution armée du Capital simplement dans la préparation militaire actuelle contre les insurrections et appeler à préparer "comme le Capital et contre lui" la guerre civile de demain, c’est se placer sur le terrain choisi par celui-ci, le terrain de la contre-révolution sur lequel le prolétariat ne peut être que vaincu !
Que peuvent comprendre aujourd’hui les représentants du Capital par guerre révolutionnaire ? Une lutte armée pour une révolution politique à âme sociale. Et ils conçoivent logiquement cette guerre comme un affrontement frontal entre leur propre armée et l’armée "prolétarienne". Leur prévention-préparation de cette guerre est totalement déterminée par cette conception, car ils ne sont que les gestionnaires du Capital et c’est en tant que tels qu’ils appréhendent cette question, comme les autres. Il en va de même pour la gauche et l’extrême gauche, épouvantails de la droite, qui ne conçoivent la lutte "révolutionnaire" que comme une lutte contre cette même droite (avec des caractères différents : violent pour l’extrême gauche, pacifique pour la gauche). C’est bien une guerre entre gestionnaires du Capital qui peut se préparer aujourd’hui.
Bien sur les armes fourbies aujourd’hui pourront être en partie utilisées contre la révolution communiste ; mais une partie de ces armes sera justement rendue inopérante par le contenu de cette révolution ; et surtout, les armes de la révolution communiste ne peuvent apparaître aujourd’hui vraiment.
Tous les gestionnaires, présents ou potentiels, du Capital ignorent ce qu’est la révolution communiste var ils ignorent ce que sont fondamentalement Capital et Prolétariat : rapport social puisant ses racines dans les rapports de production. Ils ignorent la contradiction qui fait apparaître le mouvement communiste à partir des rapports de production capitalistes.C’est cette contradiction qui, contrainte à la conscience, s’arme pour abattre les forces physiques et militaires qui, en dernier recours, répriment son besoin de manifestation positive : la société communiste se développe informelle dans les entrailles de la société capitaliste, apparaît par nécessité historique, et force, y compris par les armes, son passage à l’existence en tant que société. C’est cela, la guerre révolutionnaire communiste !
Que le Capital prépare la guerre contre révolutionnaire, c’est évident, mais il le fait d’abord à travers la nécessité de résoudre ses contradictions.
Parce qu’elle s’adapterait à la contestation immédiate de l’intégrant, la militarisation du milieu social serait une mesure mille fois plus contre révolutionnaire que toutes les stratégies strictement de défense militaire qui s’élaborent dans le vase-clos des états majors depuis 68 ! En se limitant à ce terrain, les révolutionnaires ne pourraient que proposer des contre-stratégies élaborées en vase non moins clos.
La militarisation du milieu social ce serait les travailleurs en armes - le capital variable armé le peuple en armes - qui en tant que tels ne s’opposeraient pas au Capital, car ils sont un rouage même du Capital ; mais par contre ils s’opposeraient sans nul doute à tout mouvement allant à l’encontre de cette situation, c’est à dire au mouvement communiste lui-même ; d’autre part ils pourraient défendre les armes à la main leurs intérêts de travailleurs contre les autres travailleurs !
Ce n’est pas un hasard cette vision du "peuple en armes" a généralement aujourd’hui ses racines dans le combat du peuple vietnamien, car c’est bien une guerre capitaliste qui s’est déroulée - et se déroule encore - en Indochine, une guerre entre fractions capitalistes opposées pour la conquête du sol vietnamien (capital américain, russe, chinois et/ou national) et pour l’écoulement de la production d’armement.
Que les travailleurs soient armés afin de se faire massacrer pour le Capital est dans sa logique interne, c’est le propre mouvement de sa barbarie.
La perfection de celle-ci serait atteinte lorsque la militarisation ne toucherait plus seulement les fractions nationales du Capital pour la défense de chacune, mais pénétrerait, à l’intérieur de chaque nation, les différentes fractions de Capital variable !
C’est la vision achevée de l’AUTOGESTION GÉNÉRALISÉ de la survie !
Utopie du Capital ? Sans doute, mais il ne faut pas oublier que la révolution communiste ne s’oppose pas fondamentalement, à des personnages doués de raison, mais à la loi de la valeur dont la logique inhumaine a une destination terrible de nos jours : l’AUTO-DESTRUCTION DE L’HUMANITÉ !