par ArchivesAutonomies
Des générations de Français gardent à la mémoire un certain nombre de clichés héroïco-patriotiques se déroulant sur fond tricolore ou fleur-de-lys : le serment du Jeu de Paume, Henri IV et la poule au pôt, Bayard, les fillettes de Louis XI, "Saint" Louis sous son chêne, ou Jules Ferry "père de l’école obligatoire". Si de nos jours les clichés sont un peu moins grossiers (et encore, pas dans tous les manuels !), l’esprit reste le même. L’histoire est présentée comme une suite d’évènements coupés de toute réalité sociale ou économique. Une poignée de "grands hommes", rois, seigneurs, empereurs, dictateurs, généraux, parlementaires, pure jeunes filles ou courtisanes, font et défont l’histoire au gré de leur humeur ou de leur génie. Une série de petits incidents mineurs (Dépêche d’Ems, coup d’éventail du Dey d’Alger) entraînent des peuples entiers dans la guerre. L’histoire ne serait qu’une suite de malheurs, de hasards, une vaste pagaille dans laquelle de grands génies isolés viendraient de temps en temps remettre un peu d’ordre.
Le peuple, danc ce théâtre, inventé de toutes pièces, sert de figurant. Il ne tient que les petits rôles, chair à canon et piétaille dans les batailles, badauds applaudissant les rois ou les présidents, populace fanatisée dans les révolutions. Le peuple ne serait qu’un immense troupeau, mais un troupeau doué de certaines qualités : débrouillard, cartésien, patriote, et de plus ayant la chance d’habiter un des pays de la plante les plus favorisés par la nature. Nous avons en effet la chance d’habiter un hexagone harmonieux où les montagnes et les fleuves nous servent de frontières naturelles, malgré des ennemis héréditaires (tantôt les Anglais, tantôt les Allemands).
Mais tout ceci n’est qu’une vaste mystification. Les grands hommes seuls ne seraient rien, et l’histoire n’est pas une suite incohérente de faits, mais le reflet d’une lutte incessante menée par le peuple pour son émancipation. Dans cette revue, nous nous proposons de mieux faire connaître l’histoire du peuple, c’est-à-dire sa vie quotidienne, ses révoltes, ses joies, ses souffrances. Nous tenterons de ressusciter les évènements volontairement passés sous silence ou déformés, depuis les Jacqueries paysannes du Moyen Age, méprisées par les historiens-moines des couvents, jusqu’aux barricades des années 1830 ou de la Commune. Nous essaierons de démystifier un certain nombre de "grands personnages" frauduleusement présentés comme des progressistes ou des amis du peuple.
Nous publierons enfin un certain nombre de documents destinés aux enseignants et aux lycéens, dans le but de susciter des initiatives, et d’élargir le travail de recherche et de réflexion. En effet, nous sommes une équipe de jeunes enseignants, et nous savons que, seuls, nous ne pourrons mener à bien une tâche aussi vaste. C’est pourquoi nous faisons appel à vous pour nous aider dans tous les domaines. Nous aider, en nous faisant parvenir des documents, des gravures ou des reproductions, des articles, des témoignages, qui nous permettront d’améliorer le contenu de notre revue. Nous aider financièrement, car, si nous ne poursuivons aucun but lucratif, nos ressources sont réduites, et nous ne pourrons augmenter notre tirage, et donc toucher un public plus large, que grâce à votre participation financière.
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