par ArchivesAutonomies
Mais bien des gens attentifs comprenaient que sont des romans tels que "la Maison de l’homme", "Le pauvre Christ" et "Pureté" se cachait quelque chose.
C’était en effet un théoricien du socialisme qui se cachait là-dessous (!)
(Mario Mariani. L’équilibre des égoïsmes, p. 10).
Dans une période où le mouvement politique du prolétariat, mouvement qui a traversé la grande expérience historique de la guerre paraissait avoir acquis définitivement un caractère strictement classiste et révolutionnaire, se trouve dans une période où cette crise aigüe de l’agrégat politique le plus grand qui se soit produit au cours de l’histoire du mouvement ouvrier, provoque une réaction conséquente des éléments les plus sains qui se trouvent encore dans son sein et en même temps une germination de nouvelles couches politiques ; il parait logique qu’à côté de l’essor de nouvelles perspectives tactiques plus mûres au point de vue du problème révolutionnaire et de la formation de nouveaux agrégats politiques conséquents et purement révolutionnaires ressortissent de cette crise des formations politiques d’origine nettement bourgeoise, cherchant à s’insérer dans le mouvement classiste du prolétariat. Et c’est en agitant le drapeau de l’action et du combat que ces formations politiques à l’esprit pseudo-révolutionnaire profitent du mécontent et de l’incertitude de certaines couches de la classe ouvrière, de l’impatience de quelques éléments dont le manque de maturité politique produit le phénomène caractéristique (encore excessivement développé, si l’on considère le jugement sévère de la réalité historique) du snobisme insurrectionniste, du fanatisme de l’action à tout prix. Il est regrettable de constater que par ce moyen un nombre relevant d’éléments qui en mûrissent politiquement dans l’expérience du mouvement classiste pourraient contribuer efficacement à l’action réellement révolutionnaire détournée de la ligne au point de vue idéologique et tactique nettement prolétarienne. Nous n’aimons pas procéder par des analogies, affirmées apodictement sur la simple ressemblance extérieure et formelle de phénomènes politiques et historiques. Notre avis sur ce point de vue particulier correspond à l’avis exposé dans un de ses articles très brillants par l’ex-dirigeant du P.C.F. Souvarine, duquel toutefois nous sépare aujourd’hui, ainsi qu’il nous a séparés hier, toute notre système tactique, tout à fait différent du sien. Dans cet article, paru il y a peu près deux ans sur le Bulletin Communiste, organe de la fraction communiste de droite (nous n’avons pas peur de cette analogie particulière de notre pensée sur une méthode de raisonnement avec la droite), Souvarine s’est moqué, au sujet des questions nationales, finement de la manière idéologique poussée à l’excès et adoptée comme une sûre méthode de démonstration et réfutation par les néo-léninistes, et il est louable qu’un mot ait déjà été prononcé contre ce système qui permet de liquider en cinq sec toute une plateforme idéologique.
Comme d’autre part, nous nous proposons de donner dans cet article un coup d’œil un peu plus profond que le "Lavoratore Italiano", organe des groupes communistes italiens, où quelque journal anarchiste en langue italienne, à cette tentative de nouvelle idéologie prétendue révolutionnaire qui passe sous le nom de "Volontisme" (même nous estimons qu’il est nécessaire pour le mouvement prolétarien de déblayer le terrain de toute morbidité théorique au moyen d’un sérieux examen), il ne sera pas risqué d’affirmer dès maintenant que des mouvements politiques tels que le Fascisme, le Garibaldinisme et le Volontisme sont nés toujours et naissent justement aux moments les plus critiques de l’action du prolétariat et plus précisément sont une apparence de "terribilisme anarchiste" ou de total renversement de la méthode traditionnelle et réelle de la lutte des classes. Cette concordance de phénomènes politiques pséudo-révolutionnaires devient très importante et nous examinons les événements particuliers, d’où toutes ces formations marquant la décadence idéologique de la bourgeoisie ont leur point de départ. Mario Mariani lui-même revendique cette origine quand il nous la décèle surgissante au milieu des événement, qui furent comme l’ouverture de la grande crise mondiale du capitalisme, crise d’où l’on n’est pas encore sorti et d’où l’on ne sortira certainement plus ; dans sa préface à "l’Equilibre des Égoïsmes", p.13, où il écrit en effet : "Pour ce qui a trait au "Retour de Machiavel" et sur quelques attitudes de pensée de l’immédiat après-guerre, j’ai été déjà forcé d’expliquer maintes fois, trop de fois, que les socialistes interventistes ne pouvaient pas avoir quelques choses de commun avec les fascistes de la phalange qui fut la première de toutes. Mais nous ne pouvions pas d’ailleurs suivre le Fascisme aussitôt qu’il devint une réaction pure et simple". Dans ce passage très naïf de Mario Mariani, tandis que d’une part le Fascisme est présenté tel qu’un phénomène qui s’affirme d’abord comme quelque chose de nécessaire, dans la suite de son développement se nie comme une réaction pure et simple et enfin s’affirme à nouveau (et pour un anti-hégélien, quelle jolie force que cette négation de la négation !) dans une forme "aufgeheben" (élevée dans la négation) dans l’esprit de Mario Mariani (et il est bien triste de constater qu’un cerveau si bien ferré en glace contre le "triadisme" de la dernière manifestation de l’idéalisme allemand, se laisse faire par des faiblesses si antivolontistes !) d’autre part il est exprimé, affirmé avec une clarté suffisante en même temps que la bonté originaire du fascisme de la première heure, même la communauté d’origine du Volontisme avec le Fascisme lui-même et bien mieux encore plus qu’une communauté, une parfaite identité de cette origine. Allons-nous maintenant esquisser une pensée à nous, qui est devenue dans notre esprit même une conviction, mais que Mariani ne saurait laisser passer que sous le mot "d’hypothèse" ? L’expérience révolutionnaire de la dernière période du mouvement prolétarien en Italie nous en donne la possibilité et le droit ; ces analyses confirmées et autorisées par le "Pitagore" du mouvement volontiste lui-même, ne sont le produit du hasard (qui arrange tant le "nouveau théoricien du socialisme"), mais le produit d’une source commune, le sort de l’instinct et de l’expérience de la bourgeoisie, ou plus précisément de la confusion de ces deux éléments qui se correspondent, s’associent et se confondent ensemble admirablement. Ces formations politiques, apparemment spontanées, au sein du mouvement prolétarien, trouvent la raison de leur existence dans la base classiste de la bourgeoisie et se présentent ainsi que toutes les manifestations idéologiques et politiques du capitalisme comme des dénominations purement idéales, qui n’ont pas d’autre source que la science universelle, qui sont en dehors et au-dessus de toutes les classes. Et c’est justement sous ce dernier aspect, où des analogies avec les autres manifestations idéologiques de la bourgeoisie se font de plus en plus importantes, que se présente le Volontisme, cette nouvelle panacée universelle, ce renversement (même Mario Mariani est animé évidemment de l’esprit de contradiction, ainsi que Hume, Kant et Hegel) du matérialisme historique sur sa juste base : "la volonté des meilleurs" (et il faut ajouter que parmi ces "meilleurs" on a conté déjà des bons "frères" tels que Bellini, Pirrone, etc. (!)
Ayant remarqué cette analogie de caractère et cette identité d’origine du volontisme avec des formations politiques de la bourgeoisie tels que le fascisme ([...?]pre à Mariani d’expliquer au professeur Gentile comment il se fait que le fascisme tout en marchant se nie et ne se remplace simplement de son contenu originaire et cela toujours suivant son avis). Nous allons donner un coup d’œil général et rapide à la substance du Volontisme, car nous n’avons pas le temps (comme certainement il aura été possible à Mariani pour détruire (?) ou bien mieux pour renverser Marx en se regardant à travers la philosophie de Hegel, rapprochable, selon l’expression de Mariani, lui-même, seulement après "avoir perdu une dizaine d’années à étudier la philosophie et avoir lu au moins quelque deux milles volumes en six langues, deux mortes et quatre vivantes." Ce que Mariani doit avoir fait sérieusement pour prétendre, donné cette prémisse de culture, le "tradisme" hégélien et ce qui s’ensuit . Et avec tout cela il sautille gaiement dans son style de journaliste dupeur sur le pauvre crâne du lecteur, pour si savant que lui (!) de nous adonner à l’ergotage philosophique et littéraire de Mariani.
Il faut, d’abord, remarquer que la méthode Marianiste ou volontiste procède par paradoxes et dans ce sens-là elle n’est pas bien substantielle. Des vérités, que non pas seulement l’opinion générale a consacrées comme telles, mais aussi l’expérience et la critique de l’histoire ont établi solidement, sont nées avec un sans-gène tout à fait "italique", avec une suffisance scientifique pour convaincre les sots et gobemouches que cette affirmation-ci ou cette-là sont des vérités acquises au domaine de la pensée. Suivant cette méthode, Mariani, à page 62 du livre suscité affirme, au sujet de la Philosophie de l’Histoire de Hegel, que celle-ci ne prouve rien en ce que : "il serait beaucoup plus facile de prouver que l’histoire est antilogique". Ce "plus facile" n’est pas du tout démontré par Mariani et nous sommes sûrs qu’il se gardera bien de faire un effort pareil. Dans cet étalement de paradoxes qu’est son livre, il est bien difficile de saisir le fil logique de la vantée continuité Bergsonienne de la pensée de notre "théoricien du socialisme". Toujours est-il-que dans sa prétendue réfutation de la dialectique des idées (nous voulons bien espérer que Mariani ne nous prendra pour des Hégéliens par cela seulement que nous sommes forcées d’analyser sa méthode de "vraie culture"), se fondant sur l’avis que la pensée n’a pas de lois briadiques, Mariani remplace la conception hégélienne par le système (semi-bergsonnien, parait-il) de déviation conséquente de la pensée elle-même. Il est forcé d’admettre ainsi une systématique de la pensée, c’est-à-dire des lois de la pensée et par conséquent une logique à lui ou bien à d’autres, cela n’a pas d’importance. Mais il n’applique, en contradiction avec son paradoxe, des fois à la pensée philosophique quand il trace une esquisse de l’Histoire des idées du dix-septième siècles et des siècles suivants : "Toujours est-il que le renouveau des études de la philosophie classique et les nouveaux courants scientifiques se rencontrant au cours du dix-septième siècle, produirent deux formidables vagues de la pensée : le scepticisme anglais et l’idéalisme allemand : "Or, si l’on considère qu’à notre avis les mêmes courants scientifiques sont le produit d’un changement progressif de la sous-structure économique et que la floraison de l’Humanisme coïncide d’une manière étonnante avec la plus haute période de développement de la capacité productive des communes et des républiques maritimes, que dans la suite les découvertes maritimes apportèrent une nouvelle base matérielle au développement des rapports économiques, facilitant l’essor du mercantilisme et de la bourgeoisie, on pourra constater d’où viennent ces courants qui s’entrecroisent et ces vagues qui déferlent sur la grève de l’histoire. Et naturellement l’histoire des idées s’encadre très bien comme un pur élément de relief sur le fond de la réalité économique et sociale dans un tableau plus complet de l’histoire des hommes. Mais aussi la méthode de l’histoire à la Bergson qui ne se nourrit pas du tradisme et du matérialisme, comme celle de Mariani, n’échappe pas à ses lois logiques, qui sont au fond les lois de tout devenir historique, lois qui par la méthode de contradiction et de renversement devraient disparaître, mai qui reparaissent toujours, même si l’on s’est efforcé de les transformer au point de vue formel.
Or, l’obsession de Mariani ne consiste-t-elle pas à supprimer la "triade" et à détruire les lois dialectiques de la pensée pour pouvoir détruire aussi les lois dialectiques de l’histoire ? Au moyen d’un paradoxe, il nous nie toute loi logique à l’histoire, ensuite il nous reconduit dans l’impasse en nous faisant cadeau de nouvelles (?) lois de la pensée (qui sont enfin les lois de l’histoire) pour réfuter les lois hégéliennes de la pensée et c’est ainsi qu’il nous réfute le processus logique de l’histoire ! Il ne fait pourtant que remplacer un processus logique par un autre, le devenir dialectique par l’évolution continue de la pensée et par conséquent dans le domaine de l’histoire le procès dialectique et révolutionnaire de la conception matérialiste de l’histoire, renversement théorique de la philosophie idéaliste allemande, par un plat évolutionnisme réformiste. C’est à cette hardie (!) conception qu’aborné le risible effort de Mariani pour se dérober aux lois dialectiques de la pensée , qui réfléchissent les lois dialectiques de l’histoire et c’est ainsi qu’il revient sur des positions idéalistes et réactionnaires. Et c’est de même que tout en montrant une haine artificielle contre tout absolu, il reste sur l’apriorisme absolu de la philosophie bourgeoise quand il affirme que : "Jamais une classe saurait être l’héritière ou la production d’un système philosophique va toujours au delà des intérêts de classe. Et si nous demandions une explication à ce sujet, nous verrions sûrement se dresser l’absolu, le noumène ou d’autres rêvasseries métaphysiques comme prémisse indispensable pour justifier cette "trascendance" de toute philosophie et de la philosophie de Mariani en particulier.
En s’attardant sur Feuerbach (il est un fait remarquable que le "nouveau théoricien du socialisme" ainsi que tous les critiques de Marx, beaucoup plus sérieux que lui et dont il collectionne les arguments, les picorant un peu par ci et un peu par là, ait senti le besoin de réfuter la doctrine de Marx et Engels à travers l’hégélisme ou les différentes courants de l’hélégiasme) au sujet de la question des origines des religions, Mariani nous fait cadeau d’un fameux échantillon du cours particulièrement bergsonien de sa pensée, lequel apparait clairement fondé sur ces "déviations conséquentes qui devrait naturellement déterminer l’actuel développement historique. Admettant que le facteur économique (chez Feuerbach il s’exprime par l’aphorisme : "l’homme est ce qu’il mange", du matérialisme historique soit l’absolu du Marxisme. Il ramène le lecteur en se servant d’une méthode fort cher à Proudhon (conf. Marx, Misère de la philosophie), aux temps primordiaux où "toutes les tribus vivaient de la chasse, de la pêche ou de l’agriculture primitive." Et ensuite d’un air dégagé il affirme que pour démontrer la bonté de la thèse matérialiste et dialectique, il faudrait d’abord prouver que Dieu est né d’un besoin économique quelconque (p.75) ou d’un mode de production quelconque. Or, la méthode de la dialectique matérialiste au "devenériste" (comme s’amuse à l’appeler avec un mot modernisé M. Mariani) n’est pas tout à fait la même chose que cette fade méthode de généralisation métaphysique et M. Mariani lui-même est forcé de le reconnaître en citant à la p.83, o.c., un passage particulièrement séant à ce sujet du maître du matérialisme historique : "Dans le champ économique n’ont pas de valeur et de contenu réel que les recherches circonscrites (et dans ces recherches Marx qui, au dire de Mariani, "se contredit un nombre infini de fois", a donc démontré une telle vigueur logique que le révisionniste de tous les temps, sans vouloir comprendre parmi eux M. Mariani, lequel, même sur ce terrain n’au aucun droit à l’originalité et indépendance, s’y sont cassées les dents), à une forme spécifique de rapports de production ou distribution. Que, si de ces recherches concrètes on voulait s’élever à une synthèse générale, si l’on voulait trouver un quid commun à des phénomènes économiques essentiellement disparates, appartenant à des âges sociaux successifs, on aboutirait fatalement à dépouiller le phénomène de tout ce qui en forme la vie et en constitue le mouvement. "Or, M. Mariani prend d’un côté ce qu’il appelle l’absolu économique, et de l’autre le phénomène religieux et nous dit : "Prouvez-moi que celui-ci est le produit de celui-là." Il n’entreprend guère une analyse objective et scientifique du phénomène religieux, mais simplement il fait allusion au fait que "dans presque toutes les tribus existent des formes primitives de sentiment religieux et de rite (un examen attentif du développement religieux fait au point de vue matérialiste pourrait montrer assez clairement que dans les religions primitives le rite est tout, tandis que le contenu spirituel n’est rien), totem, tabou, fétiches." Il reconnait par contre qu’"il est des tribus qui manquent de tout sens du surnaturel". Après (à p.73, o.c.), il affirme que "l’immortalité (cette notion religieuse est de beaucoup postérieure à l’état sans âge des agrégats humains, au moins dans le sens précisé par M. Mariani) est un besoin de l’esprit (!). Le fait que même aujourd’hui il est des tribus qui ont un rite primitif et des autres qui n’en ont pas du tout, est là pour prouver que l’immortalité n’est d’aucune manière un besoin de l’esprit et par conséquent la religion non plus.
Cela prouve au contraire que les manifestations religieuses sont de simples phénomènes a posteriori et non pas des prémisses causatives a priori, qui évoluent d’une origine qui n’est pas sûrement contemporaine à celle de l’homme à des formes plus élevées au fur et à mesure que, avec le développement de la civilisation, l’état sauvage est remplacé par des organisations sociales de plus en plus perfectionnées. Il faut remarquer à ce sujet que tout ce qui nous reste du passé nébuleux est là pour prouver que les formes religieuses des formes de simple rituel s’élèvent à un ésotérisme de castes là justement où l’organisation économique prend une structure relativement plus développé. Il existe en outre un enchaînement réel entre le développement de l’idéologie religieuse et le développement économique et enfin à une phase plus avancée de ce dernier correspond aussi une transformation de l’ésotérisme religieux en système philosophiques (comme en Chine, en Inde et en Grèce, où la philosophie sort progressivement de manière tout à fait claire des mythes et cosmologies religieuses pour se frayer un chemin vers des nouvelles conceptions du monde). Après quoi, M. Mariani pourra jaser à son aise sur le "sahéisme", qui seul "pourrait s’accorder avec les idées marxiennes", car le matérialisme historique demeure unique sur ce terrain pour prêter un large horizon aux recherches, déjà commencées très sérieusement par Engels, mais interrompues et idéalisées dans la suite par les épigones. Il faut ajouter que M. Mariani est forcé, après ses pages inspirées (!) sur l’origine de la religion, où le marxisme aurait dû trouver sa mort, mais où au contraire la pensée de M. Mariani manifeste au moyen d’un gâchis indicible une infériorité méthodologique, qui ne sied pas trop au théoricien du néo-socialisme, de s’apercevoir de l’existence de la thèse biologique, qui reporte la croyance en l’immortalité non pas à un besoin de l’esprit, mais plutôt à l’ignorance de la mort naturelle ! Et avec tout cela la religion demeure, suivant Mariani, le principe dominant le développement de la civilisation ! C’est elle qui produit les sociétés et les évolue, c’est elle qui produit même le socialisme ! Et naturellement tout cela sans lutte de classes, qui n’existe pas pour M. Mariani, mais moyennant la charité chrétienne et tolstoïenne, moyennant la volonté des meilleurs ! C’est là, en abrégé, la théorie volontiste, se balançant entre le besoin de l’esprit de l’ignorance de la morte, entre l’affirmation la plus apodictement idéaliste et l’affirmation la plus empiriquement matérialiste, il jette les bases sur lesquelles la société évolue naturellement à travers des "déviations conséquentes" vers l’époque actuelle où le nouveau Messie, avec ses "frères" nouveaux apôtres, qui se différencient des anciens seulement parce qu’ils marchent en automobiles, étant donné les exigences du temps, délivrera le monde par le moyen de sa volonté. La Révolution Russe aurait été un effet, un cadeau de l’esprit de charité contenu en Tolstoï (et c’est pour cela que les bolchévistes ont publié toutes ses oeuvres pour gratitude !) et la révolution italienne sera, d’une manière analogue, le chef-d’oeuvre de charité chrétienne de Mariani. Et nous autres et nos fils, nous publierons à nouveau les oeuvres complètes de Mariani pour amuser, au moment d’ennui dangereux les maniaques spleenétiques et mélanesliques. Pourquoi, suivant l’avis de Mariani, la dialectique matérialiste (Il parle pour la vérité toujours [de] dialectique, confondant par commodité de style et de polémique, la dialectique idéaliste d’Hegel avec la dialectique matérialiste de Marx et Engels) ne peut-elle plus être acceptée de nos jours ? Parce qu’elle impose des limites à la science et à la philosophie, limites que des étudiants modernes auraient déjà dépassées. "La dialectique est (selon lui) une loi éternelle et la philosophie hégélienne est une philosophie limite et le communisme critique est une sociologie limite." Or, ce que ne remarque pas notre fin théoricien du néo-socialisme, c’est que est (selon lui) une loi éternelle la dialectique matérialiste, il y a sur ce terrain une différence profonde. Pour appeler la dialectique matérialiste, une sociologie limite (expression du reste très équivoque) il ne fallait rien que les mérites extraordinaires de notre nouveau prophète messianique. L’hégélisme est, pour ce qui a trait, à la dialectique, une doctrine philosophique de la bourgeoisie allemande, qui marque précisément le limite de développement de toute la philosophie bourgeoise en général et dans ce sens là on peut justement l’appeler une philosophie limite. Elle renferme quelque chose de révolutionnaire quand elle nie l’immobilité des formes de la pensée historique, mais d’ailleurs elle ne saurait sortir du champ de l’idéalisme sans se rappeler à la réalité du processus historique comme devenir de forces et dialectique de forces, sans renier l’universalité des catégories historiques, morales, juridiques, etc., de la bourgeoisie. La dialectique matérialiste, qui n’est pas seulement une réaction intellectuelle contre l’idéalisme ni le simple jeu de la pensée de l’homme, soit-il même très grand, mais la subjectivisation idéologique d’une réalité objective incontestablement existante (et M. Mariani, lui-même, se voit forcé de la reconnaitre, tout en essayant de circonscrire à une époque très limitée de la première moitié du dix-neuvième siècle et de quelques années après) ; c’est une méthode qui ne tend pas a devenir universelle pour toutes les époques de "l’histoire", tout en embrassant toutes les époques de la préhistoire". La méthode hégélienne demeure absolutiste en ce qu’elle est bourgeoise, la méthode marxiste est au contraire scientifique en ce qu’elle est logique et expérimentale, analytique et synthétique et non empirique ou sensualiste comme voudrait le faire croire notre distributeur de charité socialiste. Si le marxisme a sa téléologie au point de vue social, il ne saurait pas en avoir au point de vue de la conception du monde et n’impose pas des limites à la science moyennant des rêvasseries métaphysiques où par ses risibles cabrioles philosophiques et littéraires tombe à nouveau le volontisme pragmatisme éclectique très vulgaire de marque évangélique. Et malgré sa prétention d’avoir détruit la limite absolutiste du criticisme idéaliste de Kant, il se voit retomber dans la même limite d’où l’on ne sort pas si facilement par un empirisme très superficiel, soit même relativiste, mais par une critique profonde de la société bourgeoise dans son ensemble économique, sociologique et historique. Et cette société bourgeoise ne sera jamais surmontée ni perfectionnée par idéologistes qui ne font au contraire que montrer sa décadence.
Nous allons renvoyer à un autre article la suite de notre critique antivolontiste, mais en marge de cette incursion très rapide dans les bases antimarxistes du Marianisme, nous voulons remarquer que le néo-messie du néo-socialisme, en critiquant le marxisme avec un aplomb à la Marinetti, sans réussir même pas à toucher l’aspect purement extérieur du matérialisme historique, attribuant parfois à ce dernier des propriétés particulières physionomiques qu’il n’a pas, remplace le principe de la dialectique des forces historiques par un élément mystique et volitif de foi et volonté qui marque une évolution de M. Mariani du fascisme originaire à un semi-toltoïsme occidentalisé. Or, nous devons remarquer que même sur ce terrain il est comme idéologie et comme aspect politique parfaitement identique au fascisme. En 1921 et en 1922 surtout au moment de son triomphe, ce dernier se présente idéologiquement volontiste et antimarxiste. Le problème économique était un problème de "volonté" politique. Il n’est pas de montrer ici de quelle manière s’est résolu, ce problème économique moyennant un acte de volonté politique, car les faits bien connus du reste parlent bien clair. Et même lorsque le fascisme s’est fait catholique, le problème n’a pas non plus été résolu. L’examen d’une partie (la partie fondamentale) du volontisme nous permet, à ce point-ci, d’affirmer que l’analogie à laquelle nous avons fait allusion au début de cet article, n’est pas hasardée et que la pensée contenue dans le Volontisme correspond d’une manière significative à la pensée fasciste et qu’il n’est pas étonnant par conséquent ce qu’il vient d’arriver dans la famille des "frères" pleins de foi et de volonté.
Foi et volonté desquelles le prolétariat fera bien de se méfier.