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Fragments d’Histoire de la gauche radicale
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Des faits nouveaux
{Le Gauchiste}, n°4, Octobre 1969, p. 8-9.
Article mis en ligne le 26 mars 2014
dernière modification le 15 mars 2014

par ArchivesAutonomies

Depuis un certain moment, les luttes ouvrières prennent une forme différente, et ceci, pas seulement en France, mais à peu près partout en Europe (Grande-Bretagne - Italie - Allemagne), avec en plus pour l’Italie des bagarres de rues importantes.
Ces grèves se caractérisent par un certain nombre de facteurs, non pas nouveaux, mais qui prennent de plus en plus d’extension, à peu près partout en Europe. Ce sont surtout :

  • un débordement des appareils syndicaux, l’exemple le plus typique parait être l’Italie, où les ouvriers ne se contentent pas de déborder les appareils, mais aussi de mettre sur pieds leurs propres organisations, le temps de la lutte (comités de base) ;
  • les conflits démarrent souvent au niveau d’un atelier où les gars sont plus soudés et y ont leurs revendications propres, ce qui amène une grande difficulté de récupération par la bour­geoisie, l’État et les syndicats. Car il est plus facile de manoeuvrer 3 000 ouvriers qui se connaissent à peine qu’une centaine qui travaillent ensemble toute la journée ;
  • les revendications aussi ont changé, remettant en cause la pyramide sociale, pendant le mois d’août, à peu près deux cents ouvriers (agents des transports et chemin de fer) d’Usinor-Dunkerque se sont battus pendant 25 jours pour une augmentation de salaire non-hiérarchisée, les revendications portent de plus en plus sur les conditions de travail (roulants S.N.C.F. et R.A.T.P.) ;
  • les grèves sont de plus en plus dures, par exemple à la S.N.C.F., malgré les avantages acquis et l’ordre de reprise donné par les syndicats, un certain nombre de dépôts ont voté contre la reprise car toutes les revendications n’avaient pas été accordées. Un autre exemple de la dureté des luttes est celui des "Papeteries de Bretagne", à Rennes, où les employés se mirent en grève pour la réintégration d’un de leur camarade licencié juste avant les vacances et s’y remirent en rentrant ;
  • En Allemagne, la grève présente des aspects différents. Outre le débordement des appareils, les grévistes n’ont pas attendu que les prix montent pour réclamer une augmentation de salaire, mais réclament celle-ci en vue d’une augmentation des prix. Ils ont abandonné l’attitude défensive qui consistait à réclamer de la rallonge quand les prix avaient monté, mais une attitude inverse qui montre un changement de mentalité, et une attitude offensive face au patronat. En plus, cette grève affecte énormément le pa­tronat allemand car les carnets de commandes sont pleins, ce qui donne aux grévistes une arme de plus.

    Un fait est à noter, c’est que la presse se garde bien de parler de tous ces faits, sauf lorsque la grève touche l’ensemble du pays (par exemple la S.N.C.F.). Lorsque la presse en parle c’est dans un petit entrefilet bien caché, pour déformer la vérité ou pour intoxiquer (les gros titres du Parisien Libéré sont le meilleur exemple).
    Ces luttes ne nous font pas dire que la révolution est pour tout de suite, mais elles marquent une évolution nouvelle dans les luttes ouvrières. Les ouvriers prennent eux-mêmes en mains leurs revendications en passant par-dessus les appareils syndicaux, mettent en avant de nouveaux mots d’ordre, de nouvelles revendications (augmentations non-hiérarchisées, conditions de travail, etc...)
    Ils n’hésitent pas à passer outre la loi bourgeoise (les cheminots ont mis aux paniers le préavis de grève empêchant l’état de mettre en place des moyens de secours).
    Ces grèves montrent que la classe ouvrière tend a prendre en mains ses affaires, ce qui est sa seule chance d’émancipation.