Présentation succincte du Bulletin communiste (1925-1933) [1]
Le Bulletin communiste après avoir été l’organe du Comité de la Troisième Internationale est devenu l’organe du Parti communiste (SFIC) dès le numéro 50 du 10 novembre 1921 jusqu’au numéro 46 du 14 novembre 1924. A partir du moment où Boris Souvarine est exclu du PCF en juillet 1924 en raison de ses actes "d’indiscipline", il est en mesure de reprendre le Bulletin communiste ayant conservé ses droits sur le titre. C’est pourquoi la direction du PC est contrainte de faire paraître les Cahiers du bolchevisme à partir du 21 novembre 1924.
Le Bulletin communiste devient l’organe du communisme international (6e année, n° 1 du 23 octobre 1925). Il est publié jusqu’au numéro 15 du 29 janvier 1926. Ce mois-ci, le Comité de rédaction, en raison des circonstances d’alors et des illusions sur la possibilité de pouvoir s’exprimer, comme opposition, dans les colonnes de l’Humanité, ce qui impliquait de ne plus avoir le besoin "d’exercer notre activité en dehors des cadres du Parti" [2], décidait de suspendre la publication après avoir envoyé une demande de réintégration à l’IC dans une lettre du 10 décembre 1925. Puis le 17 février, des membres et des exclus du PCF se réunissent pour la première réunion du Cercle communiste Marx et Lénine qui devait publier le Bulletin communiste "en principe mensuel, mais le format et de périodicité variables selon ses moyens" [3]. Ce Cercle se comprenait comme un organisme temporaire avant de perdre sa raison d’être... "le jour où il existera en France un Parti Communiste répondant aux définitions que l’Internationale Communiste en a données. Il se dissoudra par décision prise à la majorité" [4]. Sa vocation est d’être un cercle d’étude et d’approfondissement de la doctrine marxiste pour les " révolutionnaires soucieux de s’élever au niveau des problèmes sociaux présents et à venir" [5].
Souvarine suspend la publication du Bulletin. Avec ce geste d’ouverture, il attendait et espérait que l’assemblée de l’Exécutif élargi de l’IC "voudra étudier attentivement la situation désastreuse du mouvement communiste français." [6] Souvarine espérait que l’IC condamnera l’attitude de la direction du PCF et réintégrera les exclus notamment lui-même et ses camarades. Il eut l’espérance qu’après l’éclatement de la Troïka en URSS et la mise à l’écart de Zinoviev, Staline changerait de politique.
C’était une illusion que partageait beaucoup d’exclus et la suite démontrera que cette volonté de redresser le PC et l’IC se heurta à la montée en puissance du stalinisme.
La réponse de réintégration de Souvarine sera négative. Son exclusion définitive est connue par un article de Sémard dans l’Humanité du 5 janvier 1927. Souvarine y est qualifié "d’ennemi de la révolution russe."
Ainsi, le Bulletin communiste reprend sa publication en janvier 1927 après une interruption de presqu’un an. Les numéros ne paraissent plus, dès lors, de façon régulière par manque de ressources financières. Il devient plus nettement l’organe des Oppositions communistes et notamment des Oppositions en Russie sans être parfaitement d’accord avec elles, ni avec Trotsky. Il était même circonspect contre ces dernières et notamment le bloc des Oppositions (ou l’Opposition unifiée avec Zinoviev et Kamenev) comme le confirme nombre de ses amis politiques : Marcel Body, Pierre Pascal, Lucien Laurat, etc. La publication va s’amenuiser à partir de 1928 avec 3 Bulletin, puis 2 en 1929 et le dernier en 1933. L’effort essentiel de Souvarine se porte alors sur une autre revue : La critique sociale.
Le Cercle communiste Marx et Lénine va se transformer en un Cercle communiste démocratique à partir de 1930 pour se différencier nettement des différents regroupements oppositionnels. Le dernier numéro du Bulletin — 32/33 de juillet 1933 — contient tous les documents relatifs à ce Cercle.
Nous proposons d’autres lectures sur l’évolution politique du Bulletin communiste et la naissance de la revue La Critique sociale :
- Extrait de l’article "Les vies de Boris Souvarine" dans la Critique sociale n°2, novembre 2008.
- Le texte de Jean-Louis Panné : "Aux origines : le Cercle communiste démocratique" [7]
- Le témoignage d’Edouard Liénert, "D’un cercle l’autre" [8].
Autre référence
- Livre : Boris Souvarine de Jean-Louis Panné, Ed. Robert Laffont 1993.
[1] Voir les autres présentations du Bulletin communiste, d’abord comme organe du Comité de la Troisième Internationale, puis organe du PC (SFIC) dans la rubrique consacré au PC (SFIC).
[2] Bulletin communiste n°13, "Notre Comité de rédaction répond aux dirigeants du Parti".
[3] Bulletin communiste n° 15 du 29 janvier 1926, "Cercle communiste Marx et Lénine.
[4] Bulletin communiste n° 15 du 29 janvier 1926, "Cercle communiste Marx et Lénine, point 7.
[5] Idem, point 1.
[6] Bulletin communiste n° 15 du 29 janvier 1926, "Déclaration".
[7] Paru dans le livre "Boris Souvarine et la Critique sociale", Editions La Découverte, 1990.
[8] Idem.