Présentation
Quand L’Action directe parait le 15 janvier 1908, ce nouvel hebdomadaire peut s’enorgueillir de rassembler autour de lui la fine fleur du syndicalisme révolutionnaire et des dirigeants les plus en vue de la CGT (Cornélissen, Delesalle, Dunois, Griffuelhes, Lagardelle, Merrheim, Monatte, Pouget et tant d’autres), ce à quoi s’ajoute une trentaine de leaders locaux, secrétaires de fédération professionnelle ou secrétaire de Bourses du travail. Cette initiative n’est pas sans faire écho au périodique éponyme, mensuel, paru entre 1903 et 1905 et qui rassemblait nombre des mêmes auteurs et propagandistes.
La création de l’Action directe se présente comme une réaction face aux menaces multiples auquel est confronté le syndicalisme révolutionnaire depuis 1906. Outre la réaction bourgeoise, c’est à la fois la lutte contre les prétentions guesdistes, mais aussi une volonté de l’Etat et de courants de la SFIO de ramener l’action de la CGT dans un cadre légaliste qui remobilise les militants syndicalistes révolutionnaires.
Le premier éditorial [1] est clair "Il lui faut réagir à nouveau, il lui faut lutter pour mieux résister. Ce sera le rôle du journal l’Action Directe". C’est aussi la volonté d’affirmer le syndicalisme révolutionnaire comme le creuset des idéologies et des pratiques du moment. Autrement dit les différentes sensibilités politiques des contributeurs est revendiquée. Le syndicalisme révolutionnaire se veut un dépassement. Evoquant les contributeurs, "Chacun d’eux, en vue de cette sauvegarde, agira dans la sphère qui lui est propre, n’ayant pour limite à son activité que les conditions de son milieu : anarchiste, il sera mû par le souci de travailler à une plus grande extension des sentiments autonomes et fédéralistes de la classe ouvrière ; socialiste, il déjouera les manœuvres ayant pour but d’amoindrir le mouvement syndical, il fera prévaloir en face des dogmes décrépis et des formules."
Après 32 numéros, le dernier parait le 3 octobre 1908, sans qu’il soit annoncé que ce serait la fin de cette aventure militante. Miné par les problèmes financiers, que les promoteurs de l’hebdomadaire ne cachent pas, du fait notamment d‘un nombre d‘abonnés insuffisant, l’avenir de l’Action directe semblait très tôt incertain.
Bien qu’oublié et éphémère, l’Action directe marque nettement cette volonté d’affirmation du syndicalisme révolutionnaire. Les nombreux sujets traités et la qualité de l’analyse font de cet hebdomadaire d’un format modeste de 4 pages, une publication incontournable pour s’immerger dans ce courant de pensée. Son échec ne marque pas ce besoin d’affirmation identitaire. Naitront par l’entremise des mêmes hommes La Vie ouvrière l‘année suivante, puis le quotidien La Bataille syndicaliste en 1910 qui ne cesseront ou limiteront leur édition qu’avec la survenue de la Grande Guerre.
[1] Voir l’article "Aux camarades".