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Fragments d’Histoire de la gauche radicale
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Appendice : Compte rendu de la réunion 2 août 1944
Communisme n°11, Juillet 1946
Article mis en ligne le 6 juin 2014
dernière modification le 15 mai 2018

par ArchivesAutonomies

ORDRE DU JOUR.

  • 1) La collaboration entre R.K.D. et la fraction c.r. et nos devoirs immédiats sur le plan français et sur le plan international.
  • 2) Appréciation de la situation internationale et française et des Milices patriotiques.
  • 3) Information sur les rapports entre R.K.D. et Bordighistes.
  • 4) Information sur les événements en Allemagne.

Le camarade Arm. présente la résolution suivante qui exprime la position des tous les camarades présents :

1. "L’accord de principe existe entre le R.K.D. et la fraction c.r. dans toutes les questions stratégiques ; la séparation de la fraction c.r. du parti trotskyste est inévitable et imminente, sa constitution en tant que noyau communiste révolutionnaire indépendant en France est décidée et ne dépend plus que de questions tactiques et pratiques : l’attente du Congrès National pour arracher le maximum d’adhérents.
D’autre part la débâcle impérialiste et l’ajournement perpétuel du congrès national par la bureaucratie trotskyste ainsi que ses manœuvres contre la tendance défaitiste-révolutionnaire peut précipiter cette scission inévitable.
Le R.K.D. a pris connaissance avec satisfaction de la déclaration primitive de la fraction c.r. dans le PCI au sujet de la collaboration avec le RK. DÈS MAINTENANT LE RKD CONSIDÈRE SEULE VOTRE FRACTION COMME L’ORGANISATION SŒUR EN FRANCE QUI AURA LE MÊME RÔLE À REMPLIR QUE LE RKD EN ALLEMAGNE.
Une collaboration aussi étroite que possible sur le plan politique et organisationnel s’impose entre nos deux organisations, vu les tâches identiques, vu les événements en cours et en vue, vu l’activité des "Comités européens" opportunistes et centristes, agences des différentes puissances impérialistes, anglo-américaine ou russe et vu l’abîme qui nous sépare de tous ces courants.
Il est nécessaire sur le plan français que : 1° - vous preniez position principielle par écrit, au sujet de notre Plate-Forme programmatique (5 parties) et du RCR ; 2° - Discussion sur les divergences secondaires entre nous, appréciation et perspectives du système russe ; 3° - préparation d’une conférence nationale de tous les communistes révolutionnaires français, avec une délégation du R.K.D. pour adopter les bases programmatiques et pour prendre position au sujet de la situation et des tâches immédiates.Pour préparer et assurer tout cela il faut former immédiatement un comité permanent communiste-révolutionnaire franco-allemand avec représentant des deux organisations.
Sur le plan international, pour accomplir nos devoirs urgents dans la situation qui évolue vite, il nous faut préparer une commission internationale de contact des communistes-révolutionnaires, (français, allemands, italiens, espagnols, etc.) et une véritable conférence internationale de notre tendance qui pourra faire face aux événements sur le plan international (surtout européen).
Les camarades de la fraction expriment leur accord de principe avec l’appréciation et les propositions ci-dessus ; une prise de position et une discussion approfondie des documents du RK ne sont pas encore possibles, parce que tous les responsables de la fraction n’ont pas encore suffisamment approfondi les documents de RK à cause du travail fractionnel urgent à faire. Ils combleront rapidement ce retard. Un contact permanent, c’est-à-dire aussi intense que possible pour faire face à toutes les questions politiques et pratiques est décidé. Une conférence de délégués des camarades des différentes parties de la France ainsi que la formation d’une commission internationale de contact des Communistes-révolutionnaires nécessite une préparation politique et organisationnelle plus poussée, l’accord existe sur la nécessité de l’effort commun pour atteindre ces buts. Une rédaction commune de la "Fraternisation" sera réalisée.
Le camarade R. souligne qu’actuellement, après la 1 ère étape de l’élaboration de bases politiques, la fraction se trouve à la 2ème étape (conquête d’éléments) pour passer par la suite à la 3ème étape (construction en tant que noyaux communistes-révolutionnaires indépendants).
Les camarades Fern. et Alf. considèrent que la fraction doit se considérer comme partie de l’embryon de la future organisation communiste-révolutionnaire en France. La fraction n’a rien à faire avec l’opposition trotskyste qui n’osait pas se constituer en organisme indépendant.
Le camarade Arm. démontre que des éléments des bordighistes et de GRP pourront être gagnés à la cause communiste-révolutionnaire mais que ces organisations dans leur ensemble ont déjà prouvé leur incapacité de jouer un rôle communiste-révolutionnaire ;
Tous sont d’accord avec la nécessité de former dès maintenant une contre-organisation et un contre-appareil contre l’organisation et l’appareil trotskystes pour faire face aux événements qui approchent. Il est possible que nous rencontrerons d’autres noyaux communistes-révolutionnaires, par exemple formés par des éléments se détachant des "PC" en décomposition, mais il faut néanmoins travailler comme si notre fraction était le seul noyau communiste-révolutionnaire en France.
Avant de passer au 2ème point de l’ordre du jour, un bref échange de vues à lieu sur la question russe. Ar. résume le point de vue du RKD de la façon suivante : selon notre conception la Russie fait partie du système capitaliste impérialiste international ; il n’y a actuellement pas d’impérialisme en dehors de l’impérialisme capitaliste.
Notre conception du capitalisme impérialiste est plus large que la vôtre et dépasse la conception trotskyste qui est révisionniste.
Admettre que la barbarie ait vaincu en Russie, c’est-à-dire que l’alternative historique posée par Marx-Engels (DDP comme phase transitoire vers le socialisme ou dissolution de la société capitaliste dans la barbarie) soit décidée au profit de la barbarie signifierait l’abandon de la lutte de classe prolétarienne en Russie. Ou bien la révision du marxisme. La même conclusion s’impose si on admet une nouvelle société entre l’impérialisme, stade suprême du capitalisme, et la DDP ("Société stalinienne"). Dans l’intérêt de votre discussion avec les trostkystes et de l’exactitude scientifique, il vous faut éviter ces équivoques et combler ces lacunes.
Le camarade Fern. maintient que la barbarie a triomphé en Russie ; les moyens de production ne peuvent pas se développer au-delà des possibilités de la bureaucratie-classe ; le marché existe entre l’industrie et l’agriculture russes mais pas entre des branches d’industries différentes. La réalisation de la plus-value ne dépend pas du marché, pour l’essentiel elle est réalisée directement, elle n’est pas personnelle mais étatique et planifiée, il n’y a pas de concurrence. Par conséquent on ne peut plus parler de capitalisme, mais de barbarie.
Le camarade Aff est de l’avis que la Russie se prépare à entrer dans la phase de la barbarie. La discussion étant interrompue pour des raisons techniques tous les présents sont d’accord que cet examen scientifique, même s’il n’aboutissait pas à une définition suffisamment claire, ne doit pas nous empêcher de combattre dès maintenant l’impérialisme russe oppresseur et exploiteur et faisant partie du circuit inter-impérialiste. La révolution prolétarienne contre l’impérialisme russe reste à l’ordre du jour.
Sur le 2ème point de l’ordre du jour le camarade Ar. présente la position suivante : (pages de A à E) [1]
En ce qui concerne les véritables Milices Ouvrières, il faut d’abord vérifier toutes les informations et réfuter toutes les falsifications ou exagérations de la "Vérité", il faut ensuite répondre à la question suivante : où et dans quelles proportions ont été constituées indépendamment du parti russe et pour des objets purement prolétariens des Milices Ouvrières ?
Les camarades Ray. et Alf. se déclarent absolument d’accord avec cette position et constatent qu’elle correspond à leur propre position qu’ils sont en train de mettre sur papier et qu’ils vont présenter prochainement.
Le camarade AU. a mis l’accent surtout sur le stalinisme, syphilis du mouvement ouvrier, et le trotskysme syphilis de l’avant-garde prolétarienne. Il compare le développement en France et en Allemagne et en arrive à la conclusion que l’appréciation trotskyste, surtout du CCI, considérant la France comme levier de la révolution prolétarienne en Europe, est fausse ; il rejette l’explication schématique : en France pas de défaite décisive depuis 1935 et est persuadé que l’Allemagne est le point décisif pour la révolution prolétarienne en Europe, d’autant plus qu’il n’y a en France ni armes, ni armée.
Le temps pour la formation des Milices Ouvrières n’est pas encore venu en France. Ce qui sera possible c’est la formation de Groupes Spéciaux armés dans les usines, subordonnés à l’organisation de lutte des classes dans l’usine et avec l’objectif de la défense de l’usine.

II. Autocritique du Comité directeur C.R. au lendemain du Congrès du P.C.I. - Note d’introduction.

Sur la période novembre-décembre (entre le Congrès du P.C.I. et la scission de janvier), nous donnons le texte qui suit, proposé par moi à cette époque à la Direction, rejeté par les C.R. de Paris, éludé par le camarade Arm. Ce texte montre assez bien à la fois la conscience critique embryonnaire et les illusions de nombreux C.R. à cette époque. J’y fais remarquer entre autres :

  • un certain fétichisme à l’égard des R.K.D. et du camarade Arm. qui se présentait lui-même comme la victime de légendes calomnieuses ;
  • une critique implicite de la nocivité des méthodes du camarade Arm. consistant à accumuler la discussion sur le terrain non politique, celui des "symptômes" quotidiens d’hostilité. "S’attaquer seulement aux "petits faits" ne fait que déplacer et aggraver le mal".
  • une description et une explication des crises dès ce moment incessantes dans l’O.C.R. par l’insuffisance de l’accord et de l’analyse idéologiques ;
  • la constatation de la précarité non seulement de la méthode, de l’unité d’action, de la discipline, de la division du travail, mais bien de l’unité d’organisation sur cette base.
  • la proposition d’extirper la racine des crises par une élaboration théorique, principalement sur les contradictions du capitalisme russe, l’impérialisme russe, les origines de la bureaucratie (...) et la contre-révolution, la situation en France, les mots d’ordre pratiques.

    Hors cela, je ne peux analyser le détail, et ce texte est un simple document.

    Autocritique du Comité Directeur Communiste Révolutionnaire au lendemain du Congrès du P.C.I.

    I. L’Organisation C.R. a déjà accompli une série de tâches :

  • élaboration théorique assez ample, soit à titre fractionnel dans le P.C.I., soit à titre indépendant, par le R.K.D. et les C.R. séparément ou en collaboration.
  • organisation d’un noyau parisien autonome formé essentiellement de révolutionnaires professionnels (18 août 1944) ; fusion avec la majorité de la région sud du P.C.I. en voie de rupture formelle avec le P.C.I. ; amorce d’un travail systématique à l’échelle nationale par la conférence C.R. de contact (octobre 1944).
    intervention autonome dans le mouvement ouvrier par l’initiative pratique au cours de la poussée ouvrière d’août et par la propagande (organe central, "Pouvoir Ouvrier", n°1).

    II. Malgré ces progrès, le Comité Directeur C.R. constate à ce moment :

  • 1.Une série de crises intérieures. Elles prennent forme d’animosité personnelle entre des membres de la direction qui s’accusent les uns d’activisme anarchique et de confusion, les autres de manie théoricienne et de stérilité. Ces crises se répercutent jusqu’à l’extérieur de l’organisation, gaspillent le temps et la discussion en querelles sur de "petits faits". Elles menacent la cohésion d’une organisation jeune et étroite, dans laquelle aucune régulation par la base ne peut intervenir.
  • 2. Ces crises s’accompagnent d’une série d’échecs qui les reproduisent et les aggravent d’autre part. Parmi ces échecs il faut signaler :
    • L’incapacité technique. Défaut d’argent et de tous les autres appareils qui en dépendent, notamment d’ impression.
    • D’où retard dans les publications d’agitation ("Pouvoir Ouvrier", n°2) et de propagande ("Marxisme", n°1).
    • Recul dans le genre de vie : les révolutionnaires professionnels, au lieu de consacrer leur force à des missions en usine ou hors d’usine, se replient sur des emplois "rémunérateurs" absorbants. Ce recul ne peut mener qu’à de nouveaux échecs.
    • Recul de Régions du P.C.I., faute de liaisons. Région lilloise, région lyonnaise, où le travail tend à se fixer en partie au stade fraction du P.C.I.
    • Résultat net de la faiblesse et de la non extériorisation : perte de militants, ou sympathisants, cédant aux forces centrifuges.
    • Flottement organisationnel, aggravé par l’insuffisance de matériaux d’éducation et de moyens d’action.
    • Inefficacité dans la lutte contre le centrisme : le G.R.P. reste intact (recul de P) ; - quasi absence d’un travail proprement fractionnel dans la région parisienne du P.C.I. ; impréparation technique et théorique du Congrès du P.C.I., laissant échapper l’occasion d’un coup très dur à porter au trotskysme en France et par suite en Europe.

      Une série de causes objectives peuvent être invoquées (position à contre courant) ainsi que des excuses se ramenant à l’aveu de "faiblesse". Mais cela ne fait que déplacer la question puisque le but est d’élever notre force de travail au niveau de nos tâches. Il faut donc savoir pourquoi cette force n’a pas été multipliée.
      Une autocritique valable ne se tiendra pas au niveau des petites crises quotidiennes, chargées de sentimentalisme non politique et éclatant en symptômes superficiels. Il faut rechercher les responsabilités individuelles, mais dans le cadre de la signification politique des "symptômes" qui est à la racine des fautes commises. S’attaquer seulement aux "petits faits" ne fait que déplacer et aggraver le mal.
      La seule expression C.R. en France jusqu’à la fin de 1943 était le R.K.D. émigré, détaché du trotskysme en 1938, défaitiste révolutionnaire en Russie depuis 1941, en possession d’une large Plate-Forme depuis juillet 1942, publiant des tracts d’agitation depuis juillet 1942 et le journal "Fraternisation prolétarienne" depuis janvier 1943. Le centrisme était scindé, chaque groupe déchiré de divergences, sautant d’opportunisme en opportunisme, mais aucune ligne de scission ou de divergence ne coïncidait avec la ligne de brisure de classes. Les éléments défaitistes révolutionnaires en Russie, très rares, étaient inorganisés ou fixés au centrisme (G.R.P., P.O.I., P.C.I...) ou au sectarisme (Bordighisme). Toutefois, à travers la lutte contre le social-patriotisme ouvert des trotskystes, une orientation C.R. apparaît dans le P.O.I. et à ses confins, en liaison avec le R.K.D. (fm 1943). Cette tendance agit fractionnellement dans le P.O.I., puis le P.C.I. dans la R.P. (Région Parisienne) et poursuit un travail de désagrégation en même temps qu’une élaboration de textes fractionnels (sur "l’U.R.S.S.", début 1944). Mais la fraction du P.C.I., tout en abandonnant les illusions de réformer le trotskysme, surestime les possibilités fractionnelles dans le P.C.I. en l’absence d’un pôle indépendant. Elle retarde sa rupture et donc la constitution théorique, organisationnelle et technique de ce pôle. Le sens politique de cette erreur est donné par le fait suivant : certains camarades ne prévoient la rupture que sous forme de délimitation à la fois du centrisme et de "l’ultra-gauchisme", c’est-à-dire du R.K.D. (Rapport du 1° novembre 1944). L’appréciation du R.K.D. comme ultra-gauche n’est abandonnée formellement par eux qu’à l’époque de l’insurrection nationale. C’est aussi à ce moment que la fraction du P.C.I. ("C.R." depuis mai 1944 environ), rompt avec le parti trotskyste et intervient dans la poussée ouvrière (18 août : constitution du comité C.R. parisien).
      Or le Comité Directeur constate qu’en octobre 1944 (conférence de contact), la Plate-Forme R.K. n’avait pas été lue par les C.R. (R.P.). Elle ne l’a pas été sérieusement ni entièrement en novembre 1944. En l’absence de cette étude, quels qu’aient pu être les défauts formels des R.K.D. dans l’agitation, toute caractérisation du R.K. comme ultra-gauche est superficielle, non motivée, non spontanément élaborée, et reflète par suite le jugement des centristes sur les R.K.D. Dans la mesure où les camarades à tendance C.R. appréciaient ainsi le R.K.D., ils montraient leur dépendance du centrisme, ne pouvaient s’en détacher organisationnellement. Un autre indice en est que les textes théoriques de la fraction "Contre le Courant", à usage fractionnel dans le P.C.I., notamment le texte sur "l’U.R.S.S.", tout en progressant vers le marxisme conséquent, gardaient de
      nombreuses traces ou transpositions des conceptions centristes sur "l’U.R.S.S." : la bureaucratie russe n’était pas considérée comme capitaliste, mais comme une "monstruosité" sans antécédent historique. Par là était renforcée l’illusion d’un régime intermédiaire entre le capitalisme et le socialisme, comme base matérielle de la contre-révolution stalinienne. Jusqu’à une date récente, ces textes, sans corrections, ont été considérés comme utilisables pour la propagande, de préférence à ceux du R.K.D.

      V. De ces particularités et carences ont résulté :

      Une délimitation théorique insuffisante à l’égard du trotskysme et du centrisme en général, marquée par l’incompréhension persistante du fait que les bases théoriques générales du marxisme et la pratique révolutionnaire sont liées indissolublement (projet d’une École de cadres en commun avec des non C.R. !).
      la réalisation trop tardive de l’autonomie organisationnelle, d’où l’inexistence de l’appareil technique, base d’échecs déjà mentionnés.
      l’appréciation du R.K.D. comme d’une organisation politiquement étrangère avec laquelle on réalise seulement une fédération, sans abdiquer la défiance ; de laquelle on tend parfois à se désolidariser, même devant le centrisme (crédit accordé aux calomnies du G.R.P.).
      la tendance inverse à se rapprocher du centrisme, à céder devant lui, au lieu de comprendre clairement la nécessité de le détruire (G.R.P.). [2]
      la tendance à refuser l’isolement, à envisager des regroupements confus, à résoudre les questions par "l’action", au mépris de l’élaboration politique précise.
      le rôle de pôle d’attraction C.R. joué par le R.K.D. fait de A l’incarnation pour les centristes du risque de destruction de leurs organisations. C’est pourquoi il concentre la haine des centristes, qui l’entourent de légendes calomnieuses ("manoeuvres de division"). En principe, l’hostilité persistante contre A parmi les C.R. reflète la pression centriste extérieure et l’insuffisance de fermeté C.R.

      VI. La conférence d’octobre 1944, malgré l’absence de préparation méthodique, a précisé de nombreux points d’accord, jeté les bases de l’unité organisationnelle (notamment entre R.K.D., C.R. (R.P.) et C.R. (R.T.)). Mais elle n’a pas réalisé la critique du travail antérieur, n’a pas pris position sur la Plate-Forme du R.K.D., n’a pas traité sérieusement de problèmes communs : les contradictions du capitalisme russe, l’impérialisme russe, les origines de la bureaucratie et la contre-révolution ; enfin et peut-être surtout, la situation française et le programme d’action C.R.

      VII. À défaut, plus particulièrement, d’analyse, de perspectives, de directives dans la question française, il est évident que l’accord formulé sur des problèmes généraux ne garantissait ni méthode, ni unité d’action, ni discipline. Dans ces conditions, le meilleur plan de travail ne pourrait être qu’un bluff ; l’individualisme et l’anarchie devaient se donner cours dans le domaine tactique ; l’organisation ne pouvait pas se faire, car l’organisation est la mise en oeuvre de la division du travail, subordonnée aux tâches politiquement déterminées. Neutraliser les initiatives personnelles, paralyser le travail pratique, multiplier les échecs, facteurs de nouvelles crises.
      La solution des problèmes politiques n’est pas la solution directe des problèmes pratiques. Elle en est la condition nécessaire. Nulle part, en réalité, l’unité n’est encore consolidée. Il faut se souvenir qu’à la conférence de contact, tous les délégués de la Région Sud ont formulé des réserves sur leur adhésion à l’O.C.R., motivée par une confusion égale dans le domaine théorique et tactique.

      VIII. Résumons-nous dans une brève

      Résolution :

  • 1. Les crises intérieures et échecs actuels de l’O.C.R. ne sont que la persistance dans l’organisation autonome et unifiée des résidus politiques centristes qui ont empêché les C.R. français de réaliser plus tôt cette autonomie et cette unification.
  • 2. Les restes centristes inévitables dans une tendance issue du centrisme expliquent les conflits avec la fraction C.R. la plus ancienne, la plus conséquente et la plus affermie (R.K.D.).
  • 3. Ces restes doivent être liquidés rapidement et le seront à travers une clarification critique théorique apte à donner une base programmatique sérieuse à l’unité C.R. ; la base de clarification est la plate-forme R.K.
  • 4. L’élaboration théorique doit converger avec l’expérience pratique, à développer dans une agitation immédiate, pour aboutir à un programme d’action, seul capable de faire des C.R. le pôle de regroupement révolutionnaire.
  • 5. Aucune planification ou recette technique ne peut être substituée à ces tâches. Mais leur réalisation conditionne l’urgence de méthodes d’organisation et d’un armement technique intensif.

    Novembre 1944.

    N.B. Le présent texte était suivi d’un projet de résolution sur les tâches que j’en sépare (Rodion, mai 1946).