Président : BESLAY, doyen d’âge.
Les assesseurs, absents, sont remplacés par les citoyens DEMAY et ROBINET.
Le secrétaire FERRÉ donne lecture du procès-verbal, qui est adopté, après quelques observations des citoyens Arthur ARNOULD, COURNET et LEFRANÇAIS.
L’appel nominal constate la présence de 58 membres.
À l’appel de son nom, le citoyen DELESCLUZE se lève et donne lecture d’une lettre, qu’il adresse au président de l’Assemblée réunie à Versailles, par laquelle il déclare donner sa démission de représentant et opter pour la délégation qui lui a été donnée, par deux arrondissements à la Commune de Paris. Cette déclaration est couverte d’applaudissements.
Lecture d’une lettre du citoyen Ch. ROCHAT, qui donne sa démission.
TRIDON demande que des ordres soient donnés pour que les maires et adjoints ne puissent se servir du papier blanc pour faire des affiches, qui sont de véritables appels à la guerre civile.
BERGERET a donné l’ordre d’arracher les placards de M. Picard, qui ont été apposés dans la matinée.
Il est procédé à la constitution définitive du bureau. Il sera composé d’un président, de deux assesseurs et de deux secrétaires.
Il sera renouvelable chaque semaine. Ses membres ne pourront être élus deux fois de suite.
RIGAULT propose le citoyen Blanqui comme président d’honneur.
DELESCLUZE s’élève contre cette proposition [qui est d’habitude monarchique]. Son opposition n’a pas pour but d’atteindre la personnalité d’un vieux proscrit, mais il voit, dans la présidence d’honneur, un errement monarchique.
COURNET. - À l’égard de Blanqui, et pour le cito[yen]... nous d[evons faire] quelque chose de plus efficace.
Le président BESLAY, avant de quitter le bureau, auquel son âge lui a donné le privilège de s’asseoir, fait une allocution à l’assemblée, qu’elle accueille par des applaudissements.
Après une courte discussion sur la question de subsistances, à propos de laquelle Raoul RIGAULT annonce qu’il a autorisé la sortie des blés de semence, on procède à l’élection du bureau, qui se trouve constitué ainsi :
LEFRANÇAIS, président.
RANC, VAILLANT, assesseurs.
ARNAUD, PARENT, secrétaires.
RIGAULT propose que la Commune de Paris adopte les enfants du citoyen Sapia et les familles des victimes du 22 janvier et du 18 mars.
Le Conseil de légion du 17e arrondissement prévient le Comité central que les employés d’octroi viennent de recevoir l’ordre de ne plus faire de perceptions pour la Ville de Paris, qu’ils aient à rejoindre Versailles , sans quoi ils seront considérés comme démissionnaires.
Une commission, nommée, sort de la salle, pour aller chercher les membres du Comité central et les inviter à se rendre parmi nous.
Entre-temps, discussion sur la formation d’une commission exécutive. Elle sera composée de sept membres. Elle sera permanente. Elle recevra les députations. Ses pouvoirs auront un mois de durée.
Entrée du Comité central. Les citoyens Boursier, Arnold, Viard, Lavalette, Clémence, membres du Comité, prennent tour à tour la parole. Ils déclarent qu’ils ne cesseront d’être toujours en accord avec la Commune, qu’ils considèrent comme le seul pouvoir régulier.
Le Comité, qui redevient le conseil général de la Garde nationale, ne saurait s’immiscer dans les actes directs de la Commune il saura les faire respecter ; de concert avec la Commune, il réorganisera la Garde nationale ; provisoirement, il ira siéger place Vendôme, à côté de l’État-major.
Ses explications sont accueillies favorablement par l’assemblée, et le Comité quitte la salle aux cris de "Vive la République ! vive la Commune !".
FORTUNÉ rend compte de la mission qu’il a été chargé de remplir près de la 14e légion.
JOURDE annonce que le Comité central de l’artillerie de la Seine vient de faire acte d’adhésion à la Commune et explique quelle sera son organisation future.
DUVAL appelle l’attention de l’assemblée sur le séquestre à mettre sur les fonds versés par la famille Bonaparte, dans les compagnies d’assurances.
Une discussion s’engage à ce sujet entre les citoyens DUVAL, PROTOT, BESLAY.
Renvoyé à une commission spéciale, qui sera nommée ainsi que d’autres, lesquelles auront à pourvoir aux différents services.
On procède à la formation de ces différentes commissions, qui prendront les titres suivants :
Commission exécutive, - des finances, - militaire, - justice, - sûreté générale, - des subsistances, - industrie et échange, - des relations extérieures, - des services publics, - de l’enseignement.
On procède à l’élection des membres, qui composeront chacune de ces commissions. Elle donne les résultats suivants :
Commission exécutive :
58 votants.
Eudes, 43 voix ; Tridon, 39 ; Vaillant, 38 ; Lefrançais, 29 ; Duval, 27 ; Pyat, 24 ; Bergeret, 19 ; Rigault, 18 ; Mortier, 11 ; Jourde, 11 ; Protot, 10 ; Varlin, 10 ; Delescluze, 9 ; Cournet, 8 ; Grousse t, 7 ; Ranc, 7 ; Meillet, 6 ; Parent, 6 ; Pindy, 6.
Commission des finances. - Clément Victor, Varlin, Jourde, Beslay, Règère.
Commission militaire. - Pindy, Eudes, Bergeret, Duval, Chardon, Flourens, Ranvier.
Justice. - Ranc, Protot, Léo Meillet, Vermorel, Ledroit, Babick.
Sûreté générale. - Raoul Rigault, Ferré, Assi, Cournet, Oudel, Chalain, Gérardin du 17e.
Subsistances. - Dereure, Champy, Ostyn, Clément, Parisel, Emile Clément, Henri Fortuné.
Travail et échange. - Malon, Fränkel, Theisz, Dupont, Avrial, Loiseau-Pinson, Eug. Gérardin, Puget.
Relations extérieures. - Ranc, Paschal Grousset, U. Parent, Art. Arnould, Ant. Arnaud, Delescluze, Ch. Gérardin.
Services publics. - Ostyn, Billioray, J.-B. Clément, Martelet, Mortier, Rastoul.
Enseignement. - J. Vallès, Goupil, Lefèvre, Urbain, A. Leroy, Verdure, Demay, Dr Robinet, Miot.
Deuxième séance du mercredi 29 mars
Avant ouvert[ure] à 10 heures.
Citoyens de l’octroi viennent déclarer qu’ils adhèrent à la Commune ; ils sont réunis au Café des Halles centrales.
PINDY. - OUDET. - VAILLANT.
Divers membres réclament que l’Hôtel de Ville soit rendu libre, que des locaux soient affectés aux commissions et que la situation soit nettoyée au point de vue de l’embarras des bataillons qui sont dans l’Hôtel de Ville. Le transfert du Comité à la place Vendôme coupera court à des difficultés délicates.
L’ordre du jour débattu est fixé. - Lecture du projet de constitution par LEFRANÇAIS. - Trouvé trop long.
Question des loyers. - Question des échéances. - Du Prussien.
CLÉMENT demande que la Commune ne s’impose pas comme gouvernement politique.
OUDET. - Mesures énergiques contre les agents de la réaction.
PARISEL - Que l’on fasse appel à la province.
CHALAIN. - Nous avons les forces ; restons sur une défense énergique. Non pas nous imposer à la France, mais tout faire pour l’affranchir. Il faut dissoudre l’assemblée de Versailles, si vous voulez conserver la République.
CHAMPY parle dans le même sens.
GROUSSET donne lecture d’une proposition tendant à ce que l’assemblée de Versailles soit dissoute. Ceux de ses membres qui tenteraient, à la promulgation du présent décret, de se réunir sont mis hors la loi.
La Commune de Paris assurera l’exécution des prél[iminaires] de paix et se mettra en rapports diplomatiques avec elles.
THEISZ combat la proposition. Sommer l’assemblée de Versailles de s’éloigner. Elle nous gêne. Au nom de notre autonomie et sans sortir de nos attributions communales.
VAILLANT croit qu’il faut faire la chose sans trop le déclarer, car il faut que l’Assemblée disparaisse ou la Révolution disparaîtra. Il faut affirmer la Révolution chez nous, de façon à forcer la réaction à l’attaquer et alors nous serons forts.
GOUPIL propose de passer à la discussion de la proclamation.
LEDROIT regrette qu’on ne fasse que parler et qu’on ne fasse point d’actes. Il ramène la discussion sur le terrain des loyers.
CLÉMENCE demande que la proclamation porte sur la question des loyers, des échéances et ensuite sur la question des Prussiens.
PROTOT demande que la commission se réunisse et que, dans cette proclamation, il ne soit pas fait mention de la question de Versailles.
TRIDON croit que la proclamation doit déclarer que l’Assemblée de Versailles nous a mis en état de légitime défense et que nous devons dévoiler les manœuvres conspiratrices et jésuitiques à la province.
L’Assemblée nomme membres de la commission les citoyens Grousset, Vaillant, Tridon et Protot.
Une délégation du Comité central est introduite et remet une déclaration sur laquelle il sera délibéré plus tard.
PYAT revient sur la demande qu’il a faite de savoir si nos débats pourront être publiés et commentés des séances de la Commune.
À l’ordre du jour !
Après discussion, on laisse à la sagesse des rédacteurs de jour[naux].
CLÉMENT (du XVe) aborde la question des loyers.
FORTUNÉ HENRY fait proposition de décret.
VALLÈS, au nom de Loiseau-Pinson, en fait une autre.
ARTHUR ARNOULD, OUDET, J.-B. CLÉMENT, LÉO MELLIET, MIOT, proposent décret. - DEMAY, proposition. - GOUPIL, proposition.
Commission composée de Rigault, Goupil et Clément.
Rentrée de la commission [pour la proclamation] ; GROUSSET, sur la proclamation.
Après quelques observations et amendements de détail, la proclamation est adoptée ; elle sera signée la Commune de Paris.
Le Comité central fait savoir à la Commune qu’il a l’intention d’aller siéger au Luxembourg.
Discussion ; l’examen de nos rapports définitifs avec le Comité central est remis au lendemain.
La commission des loyers rentre et donne lecture de son projet de décret (qui est adopté après un amendement portant sur la résiliation des baux) et une autre discussion sur le paiement des logements en garni.
Projet présenté par les citoyens Henry Fortuné, Dereure, etc., sur l’abolition de la circonscription (sic).
Le décret est adopté après discussion, etc.
Actes de la Commune
1. Nomination d’une Commission pour la rédaction d’une prodamation formée des citoyens Grousset, Vaillant, Tridon et Protot.
2. Proclamation de la Commune.
"Citoyens,
"Votre Commune est constituée.
"Le vote du 26 mars a sanctionné la Révolution victorieuse. Un pouvoir lâchement agresseur vous avait pris à la gorge, vous avez, dans votre légitime défense, repoussé de vos murs ce gouvernement qui voulait vous déshonorer en vous imposant un roi.
"Aujourd’hui, les criminels que vous n’avez même pas voulu poursuivre, abusent de votre magnanimité pour organiser aux portes même de la cité un foyer de conspiration monarchique. Ils invoquent la guerre civile ; ils mettent en œuvre toutes les conceptions ; ils acceptent toutes les complicités ; ils ont osé mendier jusqu’à l’appui de l’étranger. Nous en appelons, de ces menées exécrables, au jugement de la France et du monde.
"Citoyens,
"Vous venez de vous donner des institutions qui défient toutes les tentatives.
"Vous êtes maîtres de vos destinées. Forte de votre appui, la représentation que vous venez d’établir va réparer les désastres causés par le pouvoir déchu : l’industrie compromise, le travail suspendu, les transactions communales paralysées vont recevoir une impulsion vigoureuse.
"Dès aujourd’hui, la décision attendue sur les loyers.
"Demain celle des échéances ;
"Tous les services publics rétablis et simplifiés ;
"La garde nationale, désormais seule force armée de la cité, réorganisée sans délai ;
"Tels seront nos premiers actes.
"Les élus du peuple ne lui demandent, pour assurer le triomphe de la République, que de les soutenir de leur confiance.
"Quant à eux ils feront leur devoir.
La Commune de Paris".