par ArchivesAutonomies
On n’écrit pas, on gueule.
On pisse sa rage sur un papier, sur un mur.
L’Ecriture, c’est comme Dieu ou un défilé du 14 juillet, une idée masturbante pour soirée intellectuelle quand le vent de l’esprit siffle dans le désert de la Critique ; pour ces milieux où le Mao & C° bénitier remplace le goupillon d’antan (le sabre étant gardé pour la révolution divine), seul compte l’emballage.
Il n’y a pas d’écriture, mais seulement la poussée du vomi piétinant toutes les théories, toutes les psychologies, tous les masques, tous les missels blancs, rouges ou noirs. Une explosion de l’être comme un énorme pet faisant sauter tous les canaux de la raison et remontant du ventre au crâne comme une vague de sperme, un tremblement, une copulation de l’imaginaire (l’unique réalité : le moi) avec le papier.
Nous laissons l’écriture aux faiseurs de littérature, à ceux pour qui l’auteur n’existe pas (une IBM enregistre mieux la théorie).
A vous qui marchandez les tripes des autres à coups de grilles linguistiques, vous les rapaces disséquant râles et chair d’un poème pour en faire une partie d’échecs de salons. Vous fouillez, triturez, malaxez un texte, et si merde il y a vous comptez les voyelles.
Vous n’avez pas d’odeur, alors vous stérilisez celle des autres.
La chair n’a rien à foutre de l’Ecriture, elle pue et pourrit et ne récite pas les coïts interrompus d’une quelconque avant-garde littéraire ; elle n’est pas Tel Quel mais l’Homme.
De temps à autre, avec un petit capital et de grandes théories, vous achetez le privilège de juger, vous avez tous les droits divins du fric roi, vous ne savez jamais dire "j’aime" avec votre sueur, il vous faut consulter lexique et grands ancêtres, vous êtes des magnétophones égrenant le catéchisme de la rive gauche.
Nous vous écoutons en rêvant d’hommes sans mémoire, sans connaissances, émergeant à la vie et y mordant à pleines dents.
Rassurez-vous, messieurs-dames, les penseurs en sortant, nous pissons.
Pierre DRACHLINE - Michel BLAY