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Fragments d’Histoire de la gauche radicale
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Deux manifestes
L’Espagne antifasciste n°20 – 14 Novembre 1936
Article mis en ligne le 12 septembre 2020
dernière modification le 8 septembre 2020

par ArchivesAutonomies

I

Le Comité National de la Confédération du Travail (la C.N.T.) adresse le Manifeste suivant au pays et aux Syndicats espagnols. Ce Manifeste, portant sur la nomination des quatre nouveaux ministres anarcho-syndicalistes au Gouvernement de Madrid, fut publié dans l’édition du 6 novembre 1936 de Solidaridad Obrera

A l’occasion de l’incorporation de représentants de notre Centrale syndicale dans le Gouvernement de la République, nous tenons à faire connaître au public les raisons qui ont motivé cette détermination de notre part.

Convaincus, dès le premier instant où se déclenche la lutte contre le fascisme, que le succès de cette lutte dépendait entièrement de l’étroite unité d’action du prolétariat, notre Centrale s’est efforcée constamment de coordonner les forces qui constituent les ressorts puissants de la guerre avec celles des autres secteurs antifascistes. La prolongation et l’aspect révolutionnaire de cette guerre exigeait, depuis déjà quelques mois, la participation directe de la C.N.T. à la direction politique et administrative du pays, de façon à assurer définitivement l’écrasement du fascisme, et réaliser en même temps la reconstruction de l’arrière-front.

Tenant compte de cette réalité, nous proposâmes à tous les partis politiques et organisations ouvrières la création d’un organisme national qui engloberait tous les efforts : un Conseil national de Défense, dans lequel les marxistes et la C.N.T., ainsi que les républicains, seraient représentés. Malgré toute la prudence et tout le tact avec lesquels notre initiative fut introduite par tous les secteurs antifascistes, elle ne reçut pas l’assentiment des principaux partis politiques, rendant par là difficile la solution à laquelle tous nous aspirions.

La situation créée par l’incompréhension de ces secteurs, et notre ferme conviction de la nécessité d’atteindre le but proposé, nous décidèrent bien que, comme la première et la plus puissante force antifasciste du pays, nous eussions pu nous en abstenir à transiger, afin de ne pas retarder davantage notre participation dans la direction des affaires nationales, consentant à réduire à quatre le nombre de ministres représentant la C.N.T. dans le Gouvernement de Madrid.

La délicate situation de nos fronts de guerre, particulièrement ceux du centre, est la raison principale qui nous fit accepter ces conditions. L’ennemi est déjà aux portes de Madrid, et en ces moments de terrible responsabilité historique, conscients des espoirs que le peuple a placés en nous et, d’autre part, sûrs que cette concession de notre part est la meilleure garantie que nous ne poursuivons qu’un seul but dans la lutte : remporter la victoire, nous n’avons pas hésité à faire ce sacrifice pour la classe ouvrière, à laquelle nous nous devons tous et pour laquelle nous luttons.

Par cette déclaration, nous invitons tous nos "confédérés" espagnols, tous nos syndicats et toutes nos organisations à coordonner leurs efforts, à mobiliser toutes leurs ressources et leurs activités, pour assurer la défense de Madrid et son approvisionnement, assurant ainsi la victoire sur tous les fronts de l’Espagne.

Que cet événement, la pénétration de la C.N.T. dans le Gouvernement de la République, marque une nouvelle étape de la lutte contre le fascisme et soit le prélude de la victoire.

NOTE DE LA RÉDACTION. Nous publions en toute impartialité ce Manifeste, à titre d’information. Les événements ultérieurs et les appréciations définitives des camarades de tous les pays, qui ne tarderont pas à se faire valoir, seront juges de l’"événement" en question.

II

Le Comité régional de la C.N.T. a adressé aux Syndicats de la région la proclamation suivante : Chers camarades ! Notre organisation, contrainte par les circonstances critiques que nous traversons, circonstances créées par le soulèvement des sabreurs à la solde de la réaction internationale, s’est vue dans l’obligation d’exiger sa participation directe dans la conduite des affaires du pays, afin de pouvoir mieux surmonter la crise actuelle.

Quatre camarades de vos organisations ont été désignés pour faire partie du gouvernement. Ces camarades sont d’une probité éprouvée et connue, et ils sauront veiller au respect de l’intégrité de l’organisation qu’ils représentent.

Mais pour que leur mission soit la plus profitable possible dans ces tragiques instants, il faut qu’ils puissent compter sur l’appui de tous, et en particulier sur celui des organisations de Madrid, qui est l’endroit où ils doivent déployer leur activité.

La Confédération régionale du travail est entrée, contrainte par la nécessité, et au moment le plus critique, dans le gouvernement, dans le but de redonner de l’énergie au mouvement antifasciste et de gagner la guerre le plus vite possible. Que ces désirs soient convertis en réalité, cela dépend, en outre du labeur de nos camarades dans le Cabinet, de l’appui que ces camarade trouveront auprès des syndicats.

La C.N.T. n’a pas abandonné pour cela son programme, ni ses postulats. Elle a consenti à entrer dans le gouvernement uniquement et exclusivement pour gagner la guerre. Mettons tous notre volonté au service de cet objectif, et nous nous montrerons dignes d’un peuple qui a placé toute sa confiance en nous. Ce souci doit être notre meilleur stimulant dans l’accomplissement de notre tâche, qu’en fin de compte nous ne remplirons que comme notre simple devoir.

Nous n’en dirons pas davantage. Que tous soient aux côtés du gouvernement pour l’aider à triompher promptement et définitivement. Luttons jusqu’au total écrasement du fascisme. Vive la C.N.T.!

Le Comité Régional. 

Madrid, 6 novembre.